La Nuit blanche 2020 a frôlé l’annulation. Minée par les contraintes sanitaires liées à la pandémie, l’organisation de la 18e édition de ce grand rendez-vous nocturne a en outre souffert de quelques sacrifices. Budgétaire d’abord, avec 810 000 euros débloqués contre 2,5 millions en 2019. Disséminé aux quatre coins de Paris l’an passé, l’événement a cette fois été réduit à deux parcours, de chaque côté de la Seine. Rive gauche, les noctambules sont invités à cheminer du musée Bourdelle à la grande mosquée, en passant par la Villa Vassilieff, le musée Zadkine, le boulevard Edgar-Quinet, l’esplanade Gaston Monnerville et l’École des arts décoratifs. Rive droite, le parcours relie le Petit Palais, le Palais Galliera fraîchement rénové et le musée d’art moderne de la Ville de Paris. Ailleurs, une trentaine de lieux partenaires dans seize des vingt arrondissements parisiens seront ouverts au public. Pour la deuxième année, la Nuit blanche, dont l’affiche a été créée par l’artiste Maxime Rossi, se déploie aussi dans une dizaine de villes du Grand Paris : à Mains d’œuvres, qui vient de rouvrir ses portes à Saint-Ouen, à la Maison populaire de Montreuil ou aux Ateliers Médicis à Clichy-sous-Bois...
Covid-19 oblige, des deux côtés du périphérique, l’idée est d’éviter la concentration de visiteurs et d’inciter à la flânerie, en respectant les règles de distanciation sociale et le port du masque obligatoire. « Pour les projets en extérieur, le public est invité à déambuler, par petits groupes de 10 personnes maximum. Une petite dizaine de sites disposant de jauges inférieures à 100 personnes ont dû être exceptionnellement soumis à une préréservation obligatoire », précise la Ville de Paris. Les institutions présenteront surtout des œuvres et des installations à l’extérieur, dans les jardins et sur les esplanades. Seul le musée Zadkine accueillera du public, mais avec une jauge limitée à cinquante personnes et sur réservation. Malgré toutes ces précautions, des événements programmés ont encore été annulés plus tôt cette semaine, comme les performances organisées par la Ville d’Aubervilliers sur le canal Saint-Denis.
Pour cette Nuit blanche hors-norme, quelque cent projets artistiques ont été sélectionnés, dont 70 % créés spécialement pour l’événement autour du thème « Commune présence », emprunté au poète René Char. Les quatre directeurs artistiques de cette édition, Amélie Simier (directrice du musée Bourdelle), Jeanne Brun (musée Zadkine), Christophe Leribault (Petit Palais) et Fabrice Hergott (musée d’art moderne de Paris), ont fait de l’expression le point de départ d’une réflexion sur la cohabitation entre l’humain et la nature dans la ville. Suspendue dans les jardins du Petit Palais et intitulée Se laisser pousser les animaux, l’installation vidéo de Françoise Pétrovitch évoque ainsi une métamorphose entre le végétal, l’animal et l’humain. Plus loin, le musée d’art moderne de Paris confronte une araignée de Louise Bourgeois aux animaux sauvages de Jimmie Durham, à côté d’œuvres de Sheila Hicks, Ian Kiaer et Gaëlle Choisne.
De l’autre côté de la Seine, Anne-Charlotte Finel convoque dans les jardins du musée Bourdelle des créatures aquatiques sur la musique de Voiski, tandis que Laurent Grasso met en scène plusieurs sculptures d’enfant au musée-atelier Zadkine... Sur un boulevard Edgar-Quinet entièrement fermé aux voitures pour l’occasion, Laure Prouvost a installé son inquiétant Security Gate, et Boris Achour une inscription en tubes fluorescents du quatrain du poète mystique du XVIIe siècle Angelus Silesius : La rose est sans pourquoi.