Europa Nostra, la plus importante organisation de lobbying dédiée au patrimoine en Europe, a annoncé les noms des douze candidats en lice pour sa liste 2021 des « Sept sites les plus menacés ». Chacun est représentatif des principales tendances et événements auxquels notre société est confrontée.
Ainsi, l’église Saint-Denis de Saint-Omer, dans le Pas-de-Calais, est en train de tomber en ruine dans un contexte de déclin général des congrégations religieuses en Europe, même si, en France, c’est l’État qui est chargé de l’entretien des lieux de culte.
Datant de la fin du XVIIe siècle, le palais Ca’ Zenobio, l’un des plus beaux palazzi baroques de Venise, n’est plus entretenu depuis 1997, et le départ de l’ordre monastique arménien qui y envoyait des novices. La congrégation s’est retirée après 120 ans d’occupation des lieux en raison des problèmes auxquels sont confrontés les chrétiens du Moyen-Orient.
Autre exemple ? Cinq belles îles du sud de la mer Égée ont été déclarées « parc énergétique » par le gouvernement grec et doivent par conséquent être recouvertes d’éoliennes. En Autriche, le plus ancien chemin de fer à crémaillère utilise encore toutes ses machines d’origine datant de 1889, y compris ses moteurs à vapeur. Mais cette attraction située près du lac d’Achensee, dans le Tyrol, a fait faillite au printemps dernier à cause du Covid-19 et de son impact sur le tourisme.
EUROPA NOSTRA ATTIRE L’ATTENTION SUR CES SITES
À l’instar des huit autres sites, ces lieux ont tous été proposés par les antennes locales d’Europa Nostra et les organismes partenaires, soit via d’autres organisations culturelles publiques ou privées. L’église Saint-Denis, par exemple, a été nommé par Future for Religious Heritage, le réseau européen des lieux de culte historiques, membre de l’Alliance européenne du patrimoine.
Europa Nostra ne propose pas de financer des restaurations, mais réussit à attirer l’attention sur ces sites. Avec son partenaire, l’Institut BEI [de la Banque européenne d’investissement], ses représentants visitent les sites et des experts rédigent des rapports techniques et financiers, qui sont ensuite transmis aux autorités et aux médias concernés.
Dans son rapport, l’organisation constate que là où les sites sont en péril en raison de négligences ou de mauvaises planifications, elle a réussi à enregistrer quelques succès notables depuis le lancement de ce programme en 2013. La synagogue Art nouveau de Subotica, en Serbie, par exemple, est en cours de restauration grâce à un financement du gouvernement hongrois, du British Headley Trust et de la ville de Subotica elle-même.
Mais le rapport admet que l’organisation a eu moins de succès pour infléchir les grandes politiques publiques, comme pour de l’inondation de l’ancienne ville de Hasankeyf, en Turquie, en raison du projet de barrage d’Ilisu, ou de la lagune de Venise, qu’Europa Nostra a déclaré être particulièrement en danger en 2016.
Néanmoins, le discours énergique prononcé lors de la réunion du Comité du patrimoine mondial de 2019 par Sneška Quaedvlieg-Mihailovic´, secrétaire générale d’Europa Nostra, qualifiant l’inaction de l’Unesco de honteuse, a manifesté publiquement son abattement face à l’incapacité de l’Unesco à traduire dans les faits ses idéaux fondateurs.
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Les 12 sites retenus :
– Église Saint-Denis, Saint-Omer, Hauts-de-France, France.
– Chemin de fer à vapeur de l’Achensee, Tyrol, Autriche.
– Théâtre moderne de Sofia, Bulgarie.
– Cimetière de Mirogoj, Zagreb, Croatie.
– Forteresse de Narikala,Tbilissi, Géorgie.
– Ceinture Verte, Cologne, Allemagne.
– Cinq îles du sud de la Mer Égée, Grèce.
– Le Jardin Giusti, Vérone, Italie.
– Le palais Ca’ Zenobio, Venise, Italie.
– Monastère Decani, Kosovo.
– Bureau de Poste central de Skopje, Macédoine du Nord.
– Chapelle et ermitage de San Juan de Socueva, Cantabrie, Espagne.