Le Kunsthaus Zurich vient d’annoncer l’achèvement d’une extension majeure, qui doit en faire le plus grand musée d’art de Suisse. La ville espère qu’elle contribuera à la placer sur un pied d’égalité avec Bâle en tant que destination majeure pour les amateurs d’art.
Officiellement achevé le 11 décembre, le nouveau bâtiment sur la Heimplatz, signé David Chipperfield, permet au musée de doubler sa superficie. En raison d’un renforcement des restrictions relatives au coronavirus, le week-end de portes ouvertes prévu les 12 et 13 décembre a été annulé.
LA VILLE ESPÈRE QUE L’EXTENSION CONTRIBUERA À LA PLACER SUR UN PIED D’ÉGALITÉ AVEC BÂLE
Reliée par un passage souterrain au bâtiment historique datant de 1910 et situé de l’autre côté de la place, l’extension accueillera des expositions temporaires, les œuvres postérieures à 1960 et la collection Bührle – un prêt à long terme de 200 œuvres, dont des peintures de Claude Monet, Paul Cézanne, Edgar Degas, Paul Gauguin et Vincent van Gogh. Cet ensemble fera du Kunsthaus l’institution conservant la plus importante collection d’art impressionniste et postimpressionniste français en dehors de Paris.
Alors que Zurich est depuis longtemps un haut lieu du marché de l’art grâce à ses galeries, Bâle accueille en revanche la plus importante foire d’art contemporain du monde ainsi que des musées de renommée internationale tels que le Kunstmuseum et la Fondation Beyeler. Ces dernières années, les expositions du Kunsthaus de Zurich n’ont pas attiré la même attention que celles de ses deux rivaux bâlois. Mais la nouvelle extension promet « un bond en avant pour Zurich et la Suisse en tant que destination artistique », affirme le site Internet du musée.
La moitié du budget du projet, qui s’est élevé à 205 millions de francs suisses (190 millions d’euros), a été financée par la Ville et le canton de Zurich. L’autre moitié a été apportée par des donateurs privés. L’inauguration est dorénavant prévue en deux temps : d’abord par un bal d’ouverture le 10 avril 2021 suivi d’une visite en avant-première qui comprendra une nouvelle création de l’artiste et chorégraphe William Forsythe, avant une ouverture complète de la collection les 9 et 10 octobre 2021.
L’architecture de David Chipperfield entend transformer Heimplatz, l’un des carrefours les plus fréquentés de la ville, en un nouveau centre urbain pour les arts et l’éducation. Le hall d’entrée d’accès gratuit du nouveau bâtiment reliera la place à un jardin de sculptures. Situé entre l’Université de Zurich et la vieille ville, il est conçu comme un « raccourci » que les piétons seront invités à emprunter.
L’ENTRÉE DU MUSÉE A ÉTÉ EN PARTIE INSPIRÉE PAR LE TURBINE HALL DE LA TATE MODERN À LONDRES
L’entrée du musée a été en partie inspirée par le Turbine Hall de la Tate Modern à Londres, explique Christoph Felger, design director chez David Chipperfield Architects. De grandes fenêtres et de vastes portes permettront de découvrir largement les salles depuis l’extérieur. « L’idée était de susciter l’intérêt en attisant la curiosité, assure Christoph Felger. Vous pourrez ainsi voir depuis l’extérieur les activités se dérouler dans le musée et cela a des chances de vous intriguer. »
Anticipant cette ouverture, une dizaine de galeries se sont déjà installées à proximité, concentrées dans la Rämistrasse – parmi elles Eva Presenhuber et la Galerie Bromer. « L’endroit était déjà une plaque tournante pour les galeries d’art dans les années 1970, explique Daniel Baumann, directeur de la Kunsthalle de Zurich. Donc, d’une certaine façon, l’installation de ces galeries correspond à une tradition historique.»
L’EXTENSION DEVRAIT PERMETTRE DE FAIRE PROGRESSER LE NOMBRE DES VISITEURS DU MUSÉE JUSQU’À ENVIRON 400 000 PAR AN
Daniel Baumann espère que le Kunsthaus ainsi agrandi servira de « locomotive qui attirera les visiteurs » à Zurich. Dans le même temps, dit-il, le musée doit susciter la fierté des habitants : « C’est un véritable centre artistique qui émerge là-bas et beaucoup d’espoir s’en dégage. » La collection Bührle est une autre pièce maîtresse, compte tenu de la popularité durable de l’impressionnisme, ajoute-t-il. L’extension devrait permettre de faire progresser le nombre des visiteurs du musée jusqu’à environ 400 000 par an. En 2019, il en a accueilli 270 000. Mais comme le dit Christoph Felger, « l’architecture ne peut pas suffire, c’est ce qui se passe à l’intérieur qui compte ».
Beaucoup de choses dépendront du futur directeur, qui, comme l’espère le Kunsthaus, devrait faire entrer l’institution dans une nouvelle ère. L’actuel patron, Christoph Becker, prendra sa retraite en 2022 après 20 ans à ce poste. Un jury international, comprenant l’artiste Pipilotti Rist, la conservatrice du Metropolitan Museum of Art de New York Sheena Wagstaff et le directeur des expositions et des programmes de la Tate Modern à Londres Achim Borchardt-Hume, devrait annoncer le nom de son successeur au printemps.