Le 18 février, lors d’une visite guidée diffusée en direct, Sotheby’s a présenté la moitié des 30 prochaines œuvres de la collection de Linda et Harry Macklowe, qui seront mises aux enchères dans le cadre de leur divorce tumultueux, lors de la seconde des ventes ordonnées par le tribunal, le 16 mai à New York.
La première vente, en novembre, avait rapporté la somme colossale de 676,1 millions de dollars (596 millions d’euros) avec les frais, contre une estimation de 439,4 à 618,9 millions de dollars (sans les frais). Ce montant est le plus élevé jamais atteint dans l’histoire de Sotheby’s. Des records avaient été établis pour Agnes Martin, Jackson Pollock, Robert Irwin et Michael Heizer.
Seules 16 des 30 œuvres de la vente du mois de mai ont été dévoilées, les 14 dernières devant l’être à une date ultérieure à New York. Ce choix dicté par le marketing entend accentuer le buzz autour de la collection. Les pièces maîtresses de la deuxième partie, exposées par la maison de ventes à Londres jusqu’au 2 mars (avant de partir en tournée à Hongkong, Taïpei et Shanghai), ont été présentées lors d’une visite virtuelle par Will Gompertz, directeur artistique du Barbican Centre à Londres, et la conservatrice Eleanor Nairne. Les œuvres sont estimées à « près de 200 millions de dollars », ce qui signifie que le record de la première vente ne sera probablement pas battu. Tous les lots sont garantis – ce qui n’est pas surprenant compte tenu de l’agressivité dont a dû faire preuve Sotheby’s face à Christie’s pour obtenir la collection –, bien que la maison de ventes aux enchères ait refusé de révéler le pourcentage d’œuvres garanties en interne par rapport à celles couvertes par des tiers.
L’œuvre disposant pour l’instant de la plus haute estimation est une peinture de Mark Rothko de couleurs bleu et bordeaux de 1960, estimée de 35 à 50 millions de dollars (de 30 à 44 millions d’euros). Cependant, il est peu probable qu’elle batte la peinture plus lumineuse du même artiste, adjugée dans la première vente 82,4 millions de dollars (73 millions d’euros), contre une estimation de 70 à 90 millions de dollars (62 à 80 millions d’euros).
De même, l’autre lot phare de la première partie, Le Nez de Giacometti, également estimé entre 70 et 90 millions de dollars, ne sera probablement pas égalé par son alter ego dans la deuxième partie : Diego sur stèle II (1958), qui représente le frère de l’artiste, Diego, estimé entre 7 et 10 millions de dollars (6 - 8,8 millions d’euros). Peint moins d’un an après le Rothko, un paysage abstrait de 1961 de De Kooning sera proposé entre 7 et 10 millions de dollars (6 - 8,8 millions d’euros).
TOUS LES ARTISTES DÉVOILÉS, SAUF UN, ÉTAIENT PRÉSENTS DANS LA PREMIÈRE PARTIE DE LA VENTE
Tous les artistes dévoilés, sauf un, étaient présents dans la première partie de la vente. Parmi eux, Gerhard Richter, dont Marine de 1975 est estimé entre 25 et 35 millions de dollars (22 - 31 millions d’euros), et Andy Warhol. L’un des derniers autoportraits du roi du Pop Art, datant de 1986 et faisant partie de sa série Fright Wig, montré une seule fois lors d’une exposition organisée à Londres en 1995 par Antony D’Offay, sera proposé pour 15 à 20 millions de dollars (13 à 18 millions d’euros).
La seule exception est Jean Dubuffet, dont le Grand nu charbonneux – le premier grand nu qu’il ait peint – est estimé de 4 à 6 millions de dollars (3,5 à 5,2 millions d’euros). Acquis auprès de la Pace Gallery en 2002, il est le seul Dubuffet de la collection Macklowe.
Parmi les autres noms, figurent Robert Ryman dont Swift (2002), haut de deux mètres, est estimé de 8 à 12 millions de dollars (7 à 10,6 millions d’euros); une sculpture de Jeff Koons de 1986 représentant trois aspirateurs dans une vitrine, estimée de 3,5 à 4,5 millions de dollars (3 à 4 millions d’euros); et un bronze de Picasso de 1958 représentant un jeune homme – l’un des deux exemplaires de ce sujet, estimé de 1 à 1,5 million de dollars (800 000 euros à 1,3 million d’euros).
Deux œuvres de Sigmar Polke, Plastik-Wannen (1964) – de 3,5 à 4,5 millions de dollars (3 à 4 millions d’euros) – et The Copyist (1982) – estimation de 3 à 4 millions de dollars (2,6 à 3,5 millions d’euros) – seront également présentées en mai.
Tout au long de la présentation, la collection des Macklowe a fait l’objet de superlatifs, car elle est constituée de pièces de goût classique et onéreuses, Eleanor Nairne la décrivant comme « l’une des plus grandes collections d’art d’après-guerre en Amérique ». Néanmoins, certaines œuvres ne sont plus aussi recherchées par le marché actuellement, Richter et Warhol ayant vu leur demande se ralentir ces dernières années.
La raison du choix de faire appel à deux conservateurs d’institution plutôt qu’à des spécialistes de la maison de ventes aux enchères pour orchestrer la visite n’est pas claire. « Nous les connaissons et les admirons tous les deux depuis des années et nous avons pensé que, étant donné l’importance des œuvres de la collection, cela semblait être une merveilleuse occasion de leur demander de partager leurs connaissances sur ces artistes avec un public plus large », a cependant justifié un porte-parole de Sotheby’s.
Eleanor Nairne a ainsi organisé récemment au Barbican Centre une grande rétrospective de Lee Krasner, qui a permis de mettre l’expressionniste abstrait sous les projecteurs, et « Basquiat : Boom for Real ». Will Gompertz a rejoint le Barbican l’année dernière après avoir été pendant dix ans responsable pour les arts à la BBC.