L’artiste iranienne Shirin Neshat, qui vit et travaille à New York, a dévoilé une œuvre d’art numérique à Piccadilly Circus, à Londres, et au Pendry West Hollywood à Los Angeles, dénonçant la détérioration de la situation des droits de l’homme en Iran, après la mort de Mahsa Amini. La Californie abrite l’une des plus importantes diasporas iraniennes au monde. Beaucoup d’Iraniens s’y sont installés après la révolution islamique de 1979.
Ce projet de Shirin Neshat, intitulé Woman Life Freedom, a été organisé par la plateforme d’art numérique Circa. L’œuvre est présentée à 20 h 22, heure locale. Une estampe de l’artiste est également disponible sur Circa.art jusqu’au 30 octobre. 50 % des recettes sont reversées à l’organisation Human Rights Watch, basée à New York.
Woman Life Freedom se compose de deux œuvres de la série Women of Allah (1993-1997) de Shirin Neshat : Moon Song et Unveiling. « Pour moi, la signification du texte et des balles [dans Moon Song] suggère la réalité moderne et contemporaine de l’Iran, tandis que le cachemire et d’autres motifs floraux sont symboliques de la riche histoire ancienne de la Perse », explique l’artiste dans un communiqué.
« À mes yeux, cette contradiction culturelle a été le plus grand chagrin et dilemme des Iraniens qui sont partagés entre ces deux identités opposées. La majorité des Iraniens ne s’identifient pas à ces codes et lois islamiques oppressifs et ne se sentent pas à même de les respecter », ajoute-t-elle. Dans l’autoportrait en noir et blanc Unveiling (1993), on voit l’artiste recouverte des vers d’un poème de l’influent écrivain Forough Farrokhzad.
Mahsa Amini est décédée dans un hôpital iranien le 16 septembre après avoir été arrêtée par la police des mœurs du régime pour ne pas avoir respecté la réglementation du pays sur le hijab. Son père a accusé les autorités iraniennes de mensonge et affirme que son frère Kiarash a été informé qu’elle avait été battue. Les autorités iraniennes avancent, de leur côté, que l’étudiante n’a pas été maltraitée mais est décédée d’un « arrêt cardiaque soudain ». Sa mort a déclenché depuis des manifestations de masse à Téhéran comme dans les villes de Yazd, Ispahan et Bouchehr.
Dans le même temps, une lettre ouverte publiée le mois dernier et signée par des cinéastes et acteurs iraniens, parmi lesquels Shirin Neshat, Ali Abbasi et Bahman Ghobadi, déclarait : « Le gouvernement iranien a restreint l’utilisation d’Internet et bloqué l’accès aux plateformes de réseaux sociaux afin d’étouffer davantage la voix de la rue. La dernière fois que de telles mesures ont été mises en œuvre, en 2019, le gouvernement iranien a assassiné 1 500 personnes. Les cinéastes iraniens indépendants se tiennent aux côtés de ces femmes et hommes iraniens courageux et s’efforcent de filmer et de documenter l’histoire telle qu’elle se déroule avec des ressources limitées. »
Shirin Neshat a également créé une collection de NFT (jetons non fongibles) intitulée Loss for Words, commandée par la plateforme Artwrld. Dans chaque pièce, une paire de mains est représentée s’ouvrant lentement dans un geste de prière, révélant un fragment de poésie iranienne écrite par divers poètes tels que Forough Farrokhzad, Sohrab Sepehri, Ahmad Shamlou et Nima Yushij. « Venant d’un pays où il y a tant de censure et où tant de choses doivent être cachées, et avec pourtant tant de subversivité dans l’air – c’est ce que le peuple iranien a appris à gérer : l’absence de liberté d’expression signifie trouver des moyens de parler sans vraiment ouvrir la bouche », a-t-elle déclaré au magazine W. 10 % du produit des ventes de NFT seront reversés à l’organisation à but non lucratif The Brooklyn Rail.