Artiste protéiforme – photographe, mais aussi graphiste, peintre, cinéaste (on se souvient de Cassius le grand ou de Qui êtes-vous Polly Maggoo ?, satire féroce du monde de la mode) –, William Klein, décédé en 2022, laisse une œuvre pionnière et majeure du XXe siècle, dont l’influence sur plusieurs générations de créateurs perdure aujourd’hui, qu’il capte dans son objectif les mannequins d’Azzedine Alaïa ou immortalise un Serge Gainsbourg maquillé et travesti pour une pochette de disque.
Les toujours remarquables éditions Atelier EXB lui consacrent, à titre posthume, une somme sans précédent, qui rassemble sur près de 400 pages photographies, films et peintures – dont de nombreux inédits. Soit un regard rétrospectif sur une production foisonnante dont on mesure plus que jamais l’importance. William Klein – Yes s’ouvre sur ses premières peintures, avant de dérouler chronologiquement ses photographies abstraites et les séries emblématiques de New York, Rome, Tokyo, Paris, Moscou, sans oublier les images de mode, les films…
« Photographe de rue. Réalisateur de documentaires. Peintre. Cinéaste. Photographe abstrait. Écrivain. Photographe de mode. Illustrateur. Graphiste. Scénographe d’expositions. Avoir réalisé une œuvre aussi marquante et singulière dans un seul de ces domaines aurait suffi à assurer à William Klein une place de choix dans n’importe quelle anthologie des arts visuels. Mais le fait d’avoir, pendant plus de six décennies, excellé dans tous en s’arrangeant pour suivre ses propres règles est véritablement stupéfiant », écrit David Campany, directeur de L’International Center of Photography de New York dans son introduction.
« En tant qu’Américain vivant à Paris, évoluant entre deux cultures tout en n’adhérant à aucune, William Klein s’est créé pour lui-même une forme d’exil extrêmement productive, ajoute-t-il. Son intérêt pour les pays du monde entier et ses différents engagements l’ont empêché de s’enraciner. Mieux encore, il a travaillé au cœur de la machine à produire des images commerciales tout en demeurant l’un de ses critiques les plus incisifs. Il a produit certaines des images de mode et des spots publicitaires les plus iconiques de son temps tout en réalisant les films les plus critiques qui soient sur ces deux univers. Faisant toujours partie du sérail tout en demeurant étranger à ce milieu. Insider aussi bien qu’outsider. »
Dans les dernières années, le photographe avait conservé ce regard aigu et prenait plaisir à la conversation lorsqu’on le croisait dans les vernissages, notamment à la galerie Polka, à Paris. À l’instar de ses précédentes publications, il a suivi l’editing et la maquette de William Klein – Yes jusqu’au bout. Sans conteste, la monographie de référence.
William Klein – Yes, texte de David Campany, Atelier EXB, relié avec jaquette, 384 pages, environ 250 photographies couleur et noir et blanc, 69 euros.