Avec le décès d’Ilya Iossifovich Kabakov, le 27 mai 2023, à l’âge de 89 ans, disparaît une figure tutélaire de l’art conceptuel russe. Né de parents juifs le 30 septembre 1933 à Dnipropetrovsk (aujourd’hui Dnipro, en Ukraine), alors partie intégrante de l’URSS, il étudie les arts à Moscou et le graphisme à l’Institut d’État des beaux-arts Sourikov. Il commence sa carrière comme illustrateur de livres. Dans les années 1960, il rejoint le groupe du Boulevard Sretensky, persécuté par les autorités pour son approche underground. Son travail prend un tournant conceptuel dans les années 1970. Kabakov présente sa première exposition personnelle de l’autre côté du Rideau de fer à la Kunsthalle de Berne, en Suisse, en 1985, avant d’émigrer en 1987 aux États-Unis. Il était installé depuis avec son épouse Emilia à Long Island, près de New York. Les « installations totales » réalisées par le duo de créateurs, utilisant images, objets, texte, son… posent un regard critique et satirique sur la vie en Union soviétique. « Des gens qui essaient de vivre une vie ordinaire dans des conditions anormales », selon leurs propres termes.
Ilya et Emilia Kabakov ont participé à la Documenta IX à Cassel en 1992 et ont représenté la Russie à la Biennale de Venise en 1993. Le couple a reçu de nombreuses distinctions, parmi lesquelles le Praemium Imperiale pour la sculpture en 2008 au Japon. La même année, une rétrospective leur a été consacrée au Garage, à Moscou. En France, leur Étrange Cité en sept chapelles, conçue pour la 6e édition de Monumenta en 2014, au Grand Palais, à Paris, a marqué les esprits.
« C’est avec une grande émotion que le Centre Pompidou apprend la disparition d’Ilya Iossifovich Kabakov », a salué dans un communiqué l’institution française, précisant que sa collection « réunit une quarantaine d’œuvres de cet artiste essentiel, poète et génie de l’installation ». « Du 17 mai au 4 septembre 1995, son installation C’est ici que nous vivons occupa tout le Forum du Centre Pompidou, rappelle le musée. L’installation majeure L’homme qui s’est envolé dans l’espace vient d’être présentée au Centre Pompidou-Metz dans l’exposition " Les portes du possible. Art & Science-Fiction ". Un recueil de ses textes traduits en français est à paraître fin 2023 et une exposition est programmée en 2024, l’occasion de présenter Two Times, réalisée avec Emilia Kabakov en 2020 et entrée récemment dans la collection du Centre Pompidou grâce au don des artistes. »