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Pour son 200e anniversaire, la Kunstverein de Munich se confronte à son passé nazi

À l’occasion de l’exposition organisée pour son 200e anniversaire, l’institution a ouvert ses archives – dont certaines n’ont pas été consultées pendant des décennies – aux artistes et aux historiens.

Catherine Hickley
22 juin 2023
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En 2021, l'artiste Bea Schlingelhoff a confronté la Kunstverein de Munich à son histoire dans l'exposition « No River to Cross ».

En 2021, l'artiste Bea Schlingelhoff a confronté la Kunstverein de Munich à son histoire dans l'exposition « No River to Cross ».

Les anniversaires d’institutions peuvent être des événements ennuyeux, où l’on se complaît dans l’autosatisfaction. Mais au lieu de se concentrer pour son bicentenaire sur ses succès passés, la Kunstverein de Munich jette un éclairage critique et sans complaisance sur son histoire mouvementée en ouvrant des archives restées à l’abri des regards pendant des décennies.

Il serait facile de se concentrer sur les moments de gloire de l’association, fondée par trois artistes le 26 novembre 1823, pour devenir une plateforme pour l’art contemporain. La liste des créateurs qui y ont exposé au fil des décennies est un Who’s Who extraordinaire : parmi ceux dont le nom de famille commence par la lettre B, figurent par exemple Georg Baselitz, Jean-Michel Basquiat, Bernd et Hilla Becher, Joseph Beuys, Arnold Böcklin, Pierre Bonnard et Louise Bourgeois.

Mais cela reviendrait à passer sous silence certains chapitres sombres, en particulier les années qui ont précédé, accompagné et suivi le régime d’Adolf Hitler. En 1936, la Kunstverein de Munich avait exclu les « Non-aryens » de ses membres, explique Maurin Dietrich, sa directrice depuis 2019. « Nous sommes toujours à la recherche d’une liste des membres juifs – nous savons qu’ils étaient des centaines », dit-elle. Fait troublant, cette liste ne figure pas dans les archives de la Kunstverein, « c’est pourquoi nous procédons à des vérifications croisées avec d’autres archives », précise-t-elle.

L’institution présente ses archives dans le cadre d’une exposition régulièrement renouvelée, intitulée « The Archive As… » (27 mai-27 août 2023). Des artistes, des théoriciens, des historiens de l’art et d’anciens membres de l’équipe ont étudié différents aspects de ce fonds, en fonction de leurs propres domaines de recherche. L’objectif, selon la Kunstverein, est de « débattre en public de la question de la constitution des histoires ». Une vitrine de la Kunstverein présente une sélection changeante de documents – une œuvre conçue par l’artiste Julian Göthe.

Maurin Dietrich, directrice de la Kunstverein de Munich. Courtesy Kunstverein Munich

Alors que la plupart des musées allemands se sont déjà penchés sur leur passé, peu des 300 Kunstvereine (associations artistiques) d’Allemagne ont franchi le pas. Selon Maurin Dietrich, cela s’explique en partie par le fait que les Kunstvereine sont « définies par l’idée du nouveau, du contemporain et de l’avant-garde ». Elles ne possèdent pas de collections propres et ne sont donc pas confrontées comme les musées à la nécessité d’effectuer des recherches sur la provenance des œuvres.

La Kunstverein de Munich a commencé à enquêter sur son passé il y a plus de trois ans, en ouvrant des boîtes contenant des documents restées intactes depuis des décennies dans le grenier et la cave. En outre, 62 mètres de linéaire de documents d’archives ont été stockés aux archives municipales de Munich. L’artiste Bea Schlingelhoff avait déjà confronté la Kunstverein à son histoire dans une exposition en 2021, intitulée « No River to Cross ». Elle a rédigé un texte pour les statuts de la Kunstverein, dans lequel celle-ci « demande pardon pour sa collaboration avec le régime nazi et la Chambre de la culture du Reich ».

La Kunstverein a depuis obtenu une subvention pour financer un poste permanent d’archiviste, explique Maurin Dietrich. « Beaucoup de travail a été accompli, mais d’une certaine manière, nous ne faisons que commencer, reconnaît-elle. Il reste encore beaucoup à faire. »

À l’époque de la création de la Kunstverein, il n’existait pas de foire ou d’espace d’exposition pour l’art contemporain à Munich, le seul musée étant celui qui est aujourd’hui l’Alte Pinakothek. Ce nouveau club artistique connut un tel succès que le prince héritier Louis de Bavière en devint le principal mécène en 1825. Il comptait plus de 6 000 membres à son apogée (contre 1 900 aujourd’hui). Les femmes ont pu y adhérer à partir de 1829, mais ce n’est qu’en 1902 qu’elles ont été autorisées à prendre part aux votes. Jusqu’à la fin du XIXe siècle, lorsque les galeries commerciales ont commencé à apparaître, il était la seule institution à vendre de l’art dans la ville.

Mais pendant les années de la République de Weimar, à une époque où les arts et la culture se sont beaucoup développés en Allemagne, la Kunstverein de Munich et ses dirigeants souvent âgés sont devenus plus réactionnaires. Après la prise de pouvoir d’Adolf Hitler, l’association a adopté les orientations nazies.

« Le fait que l’association se soit affranchie de tout ce que l’on appelle à juste titre l’art "dégénéré" est un motif de fierté justifié, peut-on lire dans un rapport de la Kunstverein datant de 1936. Nous n’avons aucune difficulté à faire allégeance aux principes établis par le IIIe Reich pour la culture de l’art allemand. »

Le bâtiment de la Kunstverein a été détruit pendant la Seconde Guerre mondiale. L’association a déménagé ensuite sur le site où elle se trouve encore aujourd’hui, les arcades du Hofgarten, dans trois des sept salles où s’est tenue en 1937 la tristement célèbre exposition « Art dégénéré », voulue par le ministre de la propagande d’Hitler, Joseph Goebbels.

Manifestation des groupes d'émancipation des femmes allemandes au Kunstverein de Munich, 10-11 février 1973. Courtesy Kunstverein Munich

Dans les années 1970, la Kunstverein a été à nouveau à la pointe de l’art contemporain, présentant des expositions politiques et critiques à l’égard de l’establishment. Dans l’une d’elles, des étudiants de l’Académie des beaux-arts de Munich se sont penchés sur le cas d’Hermann Kaspar, un artiste qui a réalisé des commandes pour les nazis mais qui est resté professeur à l’Académie jusque dans les années 1970. Leur objectif était de critiquer l’incapacité des institutions à rompre avec le passé nazi. Le ministère bavarois de la culture avait alors menacé de baisser la subvention allouée à la Kunstverein et l’exposition avait été fermée prématurément.

Cette année, les célébrations de cet anniversaire comprennent des festivités plus conventionnelles : le week-end du 30 juin, une fête publique et un dîner pour les mécènes et les artistes seront organisés sous les arcades du Hofgarten. Luisa Fernanda Alfonso et Jan Kunkel proposeront une série de performances. Enfin, le premier ouvrage consacré à l’institution et à son histoire paraît également ce mois : FOR NOW : 200 years of Kunstverein München.

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