Sturtevant, l’art complexe de la copie chez Le Floch
L’œuvre de Sturtevant, dont on célèbrera les dix ans de la mort en 2024, est assez unique dans l’histoire de l’art. Elle réalise dès la fin des années 1960 des copies d’œuvres d’artistes contemporains et les expose presque en même temps que leurs modèles originaux à New York ou à Paris. Cette démarche, surprenante et iconoclaste, a suscité l’incompréhension et l’indignation du monde de l’art. Elle a aussi soulevé des questions qui résonnent encore aujourd’hui. La maison Le Floch, à Saint Cloud, présente dimanche 19 novembre, dans sa vente consacrée aux créations du XXe siècle, un exemplaire de « Peinture à haute tension ». Cette série de portraits exposés en 1969 et 1970 à la galerie Givaudan à Paris est une copie de celui de Martial Raysse réalisé en 1965. Le choix de ce tableau, critique acide quoique poétique de la société de consommation, peut être perçu comme une forme de mise en abyme de la peinture. Au-delà de « l’appropriation » d’un travail artistique, terme qu’elle réfutait, Sturtevant semble questionner non seulement ce qui fait l’originalité de l’œuvre, mais aussi le processus qui se joue entre l’artiste, sa pièce et le spectateur. La copiste n’est-elle pas l’ultime « regardeur » qui restitue de façon radicale et concrète ce qu’elle a vu, reçu et saisi ?
« Art Nouveau et Art Déco, Design et Arts Moderne et contemporain », dimanche 19 novembre 2023, Le Floch, Hôtel des ventes de Saint Cloud, 92210 Saint Cloud, www.lefloch-drouot.fr
Hommage à Jean Grenier chez Drouot Estimations
En 1933, Jean Grenier écrit dans son recueil d’essais Les îles, « on peut voyager non pour se fuir, chose impossible, mais pour se trouver ». Ces voyages, réels ou imaginaires, l’écrivain, philosophe et enseignant les a poursuivis dans le monde de l’art. La maison de ventes Drouot Estimations disperse vendredi 17 novembre une sélection d’œuvres dont certaines ont appartenu au philosophe. Nombre de pièces lui sont dédicacées, telles Femme et enfants, aquarelle réalisée en 1944 par Jean Dubuffet (est. 60 000-80 000 euros) ou cette encre et crayons de couleur, Le clown au bouquet de fleurs, par Marc Chagall (est. 30 000-50 000 euros). Admiré par Mishima, Jean Grenier, « chrétien taoïste », voulait explorer « la face cachée du réel ». Pas étonnant, donc, de retrouver dans sa collection des peintres dont l’œuvre abstraite invite à la méditation. Parmi eux, le Tchèque Joseph Sima, dont la toile Sans titre dédicacée « à M. et Mme Grenier » est estimée entre 100 000 et 120 000 euros ou l’artiste noir américain Beaufort Delaney, installé à Paris, dont l’huile sur toile Sans titre est aussi dédiée à « mon ami mr Jean Grenier » (est. 30 000-50 000 euros).
« Un philosophe…des artistes, hommage à Jean Grenier », vendredi 17 novembre 2023, Drouot Estimations, Drouot, 75009 Paris, www.drouot-estimations.com
Les Chanel de Mouna Ayoub chez Maurice Auction
« Mouna Ayoub est beaucoup plus qu’une collectionneuse passionnée, souligne Salomé Pirson, cofondatrice avec Marie-Laurence Tixier de la toute jeune maison de ventes Maurice Auction. C’est une véritable mécène de la haute couture qui permet de perpétuer un savoir-faire français sans égal dans le monde ». Les deux jeunes femmes se sont associées avec l’experte londonienne Kerry Taylor pour programmer deux ventes par an dédiées à l’univers de la mode et la couture. Le 20 novembre, elles proposent aux enchères 252 lots issus de la garde-robe de Mouna Ayoub. Dès le début des années 1990, la célèbre femme d’affaires libanaise se passionne pour la maison Chanel et pour son directeur artistique, Karl Lagerfeld. Ces années marquent l’apogée d’une culture de la mode qui explose : les stars ne sont plus sur les écrans mais sur les podiums. Les frères Wertheimer, présidents de Chanel, ont donné carte blanche à Lagerfeld pour redynamiser la griffe. Parmi les pièces les plus folles, un manteau du soir modèle « Coromandel » brodé par la maison Lesage « qui a demandé près de mille heures de travail dont huit cents heures de broderie », précise Salomé Pirson. Il est estimé de 150 000 à 200 000 euros. Une robe de soirée en dentelle dorée, estimée entre 30 000 et 50 000 euros, se veut un hommage à une tenue portée par Gabrielle Chanel en 1937. Un autre manteau brodé de tulle donne l’illusion d’un vison (est. 3 500-5 000 euros). Une partie des fonds récoltés sera reversée à la Fondation des Femmes.
« The golden years of Karl Lagerfeld for Chanel, from the Mouna Ayoub Haute Couture collection », lundi 20 novembre 2023, Kerry Taylor chez Maurice Auction à Paris, Pavillon Gabriel, 75008 Paris, www.mauriceauction.com