Le gouvernement allemand et les 16 Länder viennent d’adopter une réforme visant à aider les héritiers de collectionneurs juifs à récupérer les œuvres d’art spoliées par les nazis, notamment en introduisant un arbitrage contraignant, qui remplacera l’actuelle commission consultative, qui ne dispose d’aucun moyen juridique pour faire appliquer ses recommandations.
Cette réforme, qui ne nécessite pas l’approbation du Bundestag, le parlement allemand, accorde aux plaignants un accès facilité à l’arbitrage sur simple demande, contrairement au système actuel qui nécessite l’accord des deux parties pour qu’une plainte lui soit soumise. Cette réforme était voulue de longue date par le gouvernement outre-Rhin et par la commission consultative actuelle, mais elle se heurtait à l’opposition des Länder.
Claudia Roth, la ministre allemande de la Culture, a déclaré dans un communiqué publié à l’issue d’une réunion entre le gouvernement et les responsables de la Culture des Länder, qui s’est tenue le 13 mars, que l’objectif était que cette réforme puisse être effective avant la fin de l’année 2024.
« La décision commune d’aujourd’hui est un grand pas en avant vers des améliorations considérables pour la restitution des œuvres d’art spoliées par les nazis, a déclaré Claudia Roth. Nous avons convenu d’un calendrier très ambitieux. »
Selon la ministre allemande de la Culture, cette réforme permettra à l’Allemagne de mieux respecter ses engagements dans le cadre des principes internationaux non contraignants de Washington sur la restitution des objets d’art pillés par les nazis. Stuart Eizenstat, conseiller spécial du secrétaire d’État américain pour les questions relatives à l’Holocauste, avait critiqué l’Allemagne pour son retard en matière de restitution d’œuvres d’art.
Les principes de Washington, adoptés il y a 25 ans, ont été renforcés au début du mois de mars 2024 par un nouvel accord portant sur les « bonnes pratiques », signé par 22 pays et présenté à Washington par le secrétaire d’État américain Antony Blinken. Ces « bonnes pratiques » précisent que les demandeurs doivent avoir accès à des instances nationales qui statuent sur les affaires sans avoir besoin du consentement du détenteur actuel des pièces en litige.
La réforme allemande « résoudra les dossiers bloqués », affirme Ulf Bischof, un avocat berlinois qui représente les héritiers de collectionneurs juifs dont les œuvres d’art ont été spoliées par les nazis. « Pour la première fois en 25 ans, les héritiers auront une véritable chance d’être entendus par une commission d’arbitrage spécifique, même si un musée nie catégoriquement que la pièce revendiquée constitue une œuvre d’art spoliée. Les héritiers n’auront plus à implorer un troisième avis. »
Ulf Bischof espère que le gouvernement allemand et les Länder respecteront leur calendrier. « L’Allemagne doit accélérer, compte tenu de sa responsabilité historique », a-t-il déclaré.