Pour sa dixième année à New York, la foire d’art contemporain africain 1-54 (ouverte jusqu’au 4 mai 2024) est plus grande que jamais. Cette édition 2024 s’est aussi installée à un nouvel emplacement plus central. Touria El Glaoui, fondatrice et directrice de la foire, explique que la manifestation se déroule ainsi dans un quartier idéal pour tirer parti des événements artistiques organisés cette semaine à Manhattan. Pour elle, le marché de l’art africain reste stable malgré un ralentissement dans d’autres segments. La foire, qui porte le nom des 54 pays d’Afrique, est axée sur les artistes du continent et de sa diaspora. Il s’agit de la principale foire d’art contemporain dans cette spécialité.
La décision de déplacer 1-54 à Chelsea a été prise à la demande d’exposants souhaitant que l’événement soit plus proche des autres foires qui se déroulent en même temps, explique Touria El Glaoui. Le nouveau lieu, le Starrett-Lehigh Building, est un espace familier pour le monde de l’art new-yorkais et il se trouve à moins de dix minutes à pied de The Shed, où se tient en parallèle Frieze New York. Future Fair est située également à quelques pâtés de maisons.
« Nous voulions vraiment trouver un endroit situé au cœur de la ville, au cœur du monde de l’art, et Chelsea est un endroit riche en galeries qui participent également à nos foires », explique Touria El Glaoui. « Cela tombait sous le sens », ajoute-t-elle. Ce nouveau lieu succède à un entrepôt de Harlem, qui abritait auparavant la galerie Gavin Brown’s enterprise avant sa fermeture en 2020.
Avec 32 stands, il s’agit de la plus importante édition new-yorkaise de la foire depuis la première édition de 1-54 en 2015. Huit galeries y participent pour la première fois, selon El Glaoui. Parmi elles figure Amasaka Gallery, qui dispose d’espaces à Kampala (la capitale de l’Ouganda) et à Masaka (une ville située à environ deux heures au sud-ouest de la capitale) dédiés à la présentation d’œuvres d’artistes émergents. « L’Ouganda a ses problèmes, comme n’importe quel autre pays, mais je pense qu’il a aussi beaucoup de talents qui ne sont pas représentés, explique Collin Sekajugo, le fondateur de la galerie. J’ai ouvert la galerie il y a quatre ans afin de créer un espace alternatif qui permette de donner à cette créativité une visibilité internationale ». Son stand à 1-54 réunit des œuvres de Christine Nyatho, Olivia Mary Nantongo et Nabir Yo – toutes des artistes femmes ougandaises. « Le secteur de l’art, en particulier en Ouganda, est dominé par les hommes, explique Collin Sekajugo. Les artistes femme ont besoin d’être mieux exposées et d’avoir accès à davantage d’opportunités. C’est la première fois que nous exposons à 1-54, et nous avons pensé que ces artistes s’y intégreraient parfaitement, surtout à un moment où nous essayons de promouvoir l’égalité [hommes-femmes] en Ouganda ».
kó, de Lagos, revient avec un stand consacré à la peinture et à la céramique, avec l’artiste ghanéen Kwadwo A Asiedu, les Nigérians Tofo Bardi et Ngozi-Omeje Ezema, et l’Espagnole Bisila Noha. « Nous avons obtenu de très bons résultats l’année dernière et nous espérons reproduire le succès de nos ventes, déclare Joseph Gergel, directeur de kó. Nous venons de participer à 1-54 Marrakech en février et nous avons obtenu d’excellents résultats. Ce qui est bien avec 1-54, c’est que c’est petit, c’est plus intime. Cela nous donne l’occasion de faire venir un artiste émergent et de tester le marché ».
Les 32 galeries qui participent à la foire cette année sont toutes d’Afrique, d’Europe et des États-Unis. Plusieurs viennent de Paris, comme la 110 galerie Véronique Rieffel, la 193 Gallery, In Situ - fabienne leclerc, Afikaris ou, pour la première fois, la galerie La La Lande, qui a déjà participé à l’édition londonienne en octobre 2023. Elle participe à 1-54 New York avec un solo show de l’artiste Aïcha Snoussi, Prix SAM pour l’art contemporain 2020 et qui a notamment depuis exposé au Palais de Tokyo et à l’Institut du monde arabe à Paris.
Par ailleurs, bien que seuls sept exposants soient basés en Afrique, Touria El Glaoui estime que ce ratio est relativement élevé pour l’édition new-yorkaise. « Nous essayons d’être sensibles à cette question et de nous assurer que les galeries africaines sont bien représentées, explique-t-elle. Nous sommes très conscients, au sein du comité de sélection, d’encourager les galeries du continent à participer. Malheureusement, les États-Unis sont un pays coûteux et difficile d’accès pour de nombreuses galeries africaines, surtout si l’on tient compte du processus d’obtention des visas et du transport des œuvres », explique Touria El Glaoui. « Un plus grand nombre de galeries préfèrent participer à la foire à Londres ou à Marrakech pour des raisons de logistique et de coûts. Mais, même si les galeries ne sont pas basées en Afrique, celles qui viennent se concentrent sur l’art africain », poursuit-elle.
Le marché de l’art africain s’est maintenu même si d’autres secteurs se sont affaiblis, analyse Touria El Glaoui, en partie parce que les prix des œuvres de 1-54 ont tendance à se situer dans une fourchette qui reste accessible à un plus grand nombre de collectionneurs. « Dans trois mois, le marché aura peut-être beaucoup changé, dit-elle. Il se peut que nous ayons aussi de bonnes surprises. Mais, pour l’instant, je suis très optimiste ».