Damien Hirst a de nouveau été mis en cause pour avoir antidaté certaines de ses œuvres. Une enquête du Guardian publiée le 22 mai 2024 révèle qu’au moins 1 000 des peintures à l’huile sur papier créées pour un récent projet NFT n’ont pas été réalisées en 2016, comme l’a déclaré l’artiste, mais qu’elles ont en fait été produites en série en 2018 et 2019 par des dizaines de peintres engagés par la société de Damien Hirst, Science Ltd, dans deux ateliers, situés dans le Gloucestershire et à Londres. Une source a comparé leur processus de création à une « chaîne de production à la Henry Ford ».
Au total, 10 000 peintures ont été réalisées pour le projet The Currency, chacune marquée d’un micropoint, d’un cachet d’authenticité en relief et d’un titre, d’une date et d’une signature tracée au crayon au dos. Lors du lancement du projet en 2021, Hirst et Heni, la plateforme d’édition dirigée par le directeur commercial de Damien Hirst et habilitée à vendre les œuvres, ont déclaré à plusieurs reprises que les peintures avaient été « créées à la main en 2016 ».
Destinée à « explorer les frontières de l’art et de la monnaie », comme l’a déclaré Hirst à The Art Newspaper en mars 2021, The Currency a été conçue comme un projet NFT – chaque peinture est liée à un jeton numérique correspondant. Les acheteurs avaient la possibilité d’acquérir l’un des 10 000 NFT au prix de 2 000 dollars chacun, et devaient ensuite choisir de le conserver ou de l’échanger contre l’œuvre physique. La vente initiale a rapporté environ 18 millions de dollars (16,6 millions d’euros).
Pour ceux qui ont choisi le NFT, qui se comptent par milliers, l’œuvre sur papier correspondante a été brûlée par Damien Hirst à la Newport Street Gallery en octobre 2022
Selon un collectionneur qui a opté pour la peinture physique, aucun certificat d’authenticité ne lui a été délivré lorsqu’il a récupéré l’œuvre au siège de Heni à Soho. Le jour où il a choisi de conserver le tableau, le certificat d’authenticité a été retiré de son portefeuille metamask et tous les liens électroniques, y compris celui vers son reçu, ont disparu.
Traditionnellement, les dates attribuées aux œuvres d’art font référence à l’année où elles ont été achevées, mais les avocats de Science et Heni affirment qu’il est « habituel » que Damien Hirst date ses œuvres en fonction du moment où elles ont été conçues. Ils n’ont pas contesté qu’au moins 1 000 des pièces datées de 2016 selon l’artiste ont en fait été peintes plusieurs années plus tard. Selon le Guardian, il est possible que « plusieurs milliers » de peintures aient été réalisées en 2018-2019.
Les avocats de Damien Hirst avaient réagi de la même manière en mars lorsque le Guardian avait révélé que plusieurs sculptures en formaldéhyde étaient datées des années 1990 par sa société, alors qu’elles avaient été réalisées en 2017. « Les artistes ont parfaitement le droit d’être (et sont souvent) incohérents dans la datation de leurs œuvres », avaient-ils déclaré au Guardian à l’époque.
Concernant The Currency, il reste à voir si la question de la datation affectera la valeur de ces peintures. À ce jour, une centaine d’entre elles ont été revendues aux enchères, toutes portant la date de 2016, selon la base de données Artnet. Les prix varient entre 5 000 et 28 000 livres sterling (5 868 et 32 864 euros).