Katherina Olschbaur : Sweet Expulsion
Katherina Olschbaur brasse dans sa peinture de multiples références qui vont du classicisme à l’expressionnisme en passant par le Romantisme et le Surréalisme. Elle construit ses tableaux autour d’une couleur dominante qui évoque la pénombre ou le lever du jour, sans qu’on puisse identifier la source de la lumière dans laquelle baignent ses figures humaines ou animales. Elle varie aussi le degré de définition de celles-ci et fait passer dans ses œuvres quelque chose de l’esprit et de la vivacité de l’ébauche.
Expulsion est le titre de l’un des deux grands diptyques figurant dans l’exposition. C’est une « joie de vivre » féministe et nocturne. Dans la partie gauche de la composition, un ange bicéphale, doté d’une poitrine parfaite, avance d’un pas résolu et toutes paupières closes. Son bras gauche est tendu vers on ne sait quelle direction. Derrière cette figure imposante placée sous le sceau du rêve, on voit dans les lointains des figures esquissées qui ressemblent fort à Adam et Eve chassés de l’Eden. On n’en finirait pas de décrire cette œuvre complexe et assurément porteuse d’un discours. Si Katherina Olschbaur trouve une précieuse source d’inspiration dans l’imagerie chrétienne, elle se plaît à en détourner la morale et la vision patriarcale au profit d’une célébration bien terrestre de tous les sens.
Du 31 août au 21 septembre 2024, Perrotin, 10 impasse Saint-Claude, 75003 Paris
Bernard Piffaretti : « Pour finir encore »
« Pour finir encore » : avec ce titre emprunté à Samuel Beckett, Bernard Piffaretti invite à porter un autre regard sur son œuvre. Sans s’écarter du principe de travail adopté dans les années 1980, celui d’un jeu de miroirs ou de reproduction d’un ensemble de motifs autour d’une ligne centrale, l’artiste problématise et dramatise la question de l’inachèvement. Pour cela, il expose au milieu d’autres œuvres bien dans sa signature un tableau vertical dont la moitié gauche est restée vierge. La partie droite présente, elle, une grille souple blanche sur fond vert foncé. Achever le tableau pour qu’il devienne un Piffaretti tel qu’on l’imagine reviendrait à retrouver quasiment un modèle moderniste.
À ce tableau d’aspect inachevé, une réponse parfaite est donnée par un autre qui fait apparaître des taches de couleurs derrière le quadrillage rose d’une sorte de double-fenêtre.Près du bord droit de chacune des deux surfaces quadrillées est tracé un L noir inversé qui fait écho à la ligne du milieu, noire elle aussi, et l’intègre davantage dans la composition. D’une manière générale, la ligne de division semble plus que jamais prendre part au jeu qui se joue de chacun de ses côtés. C’est le cas aussi bien lorsqu’une tache ou qu’une bande s’y frotte ou s’y appuie, lorsqu’une demi-ligne semble vouloir la soulager un peu de sa charge structurale, ou bien encore lorsqu’une bande trop proche chromatiquement et physiquement provoque son quasi-effacement. Puisque Piffaretti ne s’interdit aucun motif ni aucune manière, il n’est aucune raison pour que la partie finisse. Mais, ce type de questionnement esthético-existentiel relance l’intérêt du jeu.
Du 4 septembre au 10 octobre 2024, Galerie frank elbaz, 66 rue de Turenne, 75003 Paris
Julia Rommel
Depuis une dizaine d’années, Julia Rommel développe une méthode de travail qui parvient à surmonter l’opposition entre le minimalisme et les pratiques de déconstruction du tableau des années 1970. Elle peint sur des toiles enchâssées des tableaux qu’elle désagrafe et ragrafe sur des châssis plus grands. Repeignant, pliant et liant différentes toiles entre elles, il n’existe d’autre limite à ce lent travail de démontages et de remontages successifs que sa décision d’y mettre fin à un moment donné. Parce que ses superpositions suggéraient différentes profondeurs de plans, on a parfois, dans les deux tableaux qu’elle expose ici, les suggestions d’espace au profit de la seule affirmation de la couleur et de la lumière. Les choix de couleur renvoient à des sentiments et à des histoires personnelles qu’il ne nous est pas donné de connaître. Home Alone, visible depuis la rue, est presque uniment d’un beau rouge orangé avec une bordure céleste en plusieurs bandes agrafées et, çà et là, des éclats de bleu et de vert. Snake in the Grass, accroché de l’autre côté du même mur, est construit en bandes verticales dans des tons bordeaux allant jusqu’au brun, et des bandes latérales vertes d’une peinture plus fluide. Les gestes du travail affleurent à la surface des champs colorés et la fabrique du tableau devient sujet de l’œuvre.
Du 3 septembre au 14 septembre 2024, MASSIMODECARLO - Pièce Unique, 57 rue de Turenne, 75003 Paris
Zilla Leutenegger : Rien de lourd
Peintre et vidéaste, Zilla Leutenegger a conçu son exposition démarrée à la mi-juillet en relation très libre avec le thème des Jeux olympiques. Elle expose onze monotypes représentant chacun sur un fond de couleur une figure féminine à l’exercice ou en position de repos, voire en position quasi fœtale, ce que l’artiste nomme des « anti-poses ». Le trait est simplifié, le contour marqué par un cerne noir et chacun des sujets qui s’étire, se tord ou s’étend prend la mesure de la surface de la feuille. Dans ces figures rêvées ou proches de la réalité se reflète la personnalité de l’artiste.
En vis-à-vis des monotypes sont suspendues des haltères de fitness en céramique, et au centre d’une des salles un présentoir pyramidal porte quatre doubles rangées d’haltères de musculation, elles aussi en céramique. Ces objets sont à disposition du visiteur pour des exercices à inventer en toute complicité. Rien de lourd est une vidéo projetée en présence de trois sacs de frappe qui dessinent une ombre sur l’écran. Les trois sacs sont en aluminium et peints de manière à paraître vrais. Dans la vidéo (une boucle d’une minute), la silhouette d’une femme boxe et étreint tour à tour un sac de frappe. Cette étreinte reproduit l’accolade qui permet aux boxeurs de reprendre souffle au cours du match. Zilla Leutenegger n’a manifestement qu’un intérêt limité pour les rapports du sport et de l’art, mais a su se saisir de la circonstance pour creuser des troubles et des fascinations et relever le défi de l’exposition.
Du 13 juillet au 21 septembre 2024, Galerie Peter Kilchmann, 11-13 rue des Arquebusiers, 75003 Paris
Le 20 septembre, à partir de 18 heures : performance de Zilla Leutenegger et Michele Robecchi