C’est avec une immense tristesse que nous avons appris la disparition de notre consœur et amie Élisabeth Couturier, décédée dans la soirée du 19 septembre à l’Hôpital Saint-Louis, à Paris, des suites d’une maladie. La nouvelle nous a été communiquée par son fils Félix, et son mari, Pierre Desfons.
Née en 1950 à Grenoble, diplômée de sciences politiques, de sociologie et d’arts plastiques, longtemps journaliste et critique d’art à Paris Match, Élisabeth a présidé l’AICA France (Association internationale des critiques d’art) au cours de deux mandats de trois ans, de 2018 à 2024. Le 17 juin dernier, une passation a été officialisée lors de l’Assemblée générale 2024 qui s’est tenue au centre Wallonie-Bruxelles, à Paris. Fabien Simode, ancien rédacteur en chef du magazine L’Œil, lui a succédé à la présidence de l’AICA France.
Sous sa présidence, l’AICA France s’est considérablement développée, étoffant ses rangs – plus de 580 membres. Élisabeth Couturier a également œuvré à la reconnaissance du prix AICA France de la critique d’art décerné chaque année. À son invitation, j’ai eu l’honneur d’être le vice-président du jury de l’édition 2019, aux côtés de sa présidente Laure Adler et d’Emma Lavigne, alors directrice du Centre Pompidou-Metz.
Dans la même logique – accroître la visibilité de l’AICA France dont la présidence lui tenait à cœur, et dans laquelle elle s’est beaucoup investie, défendant la critique mais aussi ses conditions d’exercice, notamment de rémunération –, Élisabeth Couturier a supervisé la publication de l’ouvrage 100 critiques, 10 ans d’art contemporain (In Fine éditions d’art), qui revient sur une décennie du prix AICA France, de 2013, année de sa création, à 2022.
« Le critique d’art est un oiseau voyageur, volontiers solitaire, et parfois jaloux de son territoire, écrit-elle dans la préface, évoquant la création et le format du prix AICA. En adaptant le principe du Pecha Kucha, inventé par des architectes et généralisé pour défendre de manière concise un projet devant diverses commissions ou face à des partenaires, nous avions visé juste. Le succès fut immédiat. » Avant de conclure : « Toujours en alerte maximum, la critique d’art, dans ce recueil phare, prouve sa capacité à se réinventer et à mettre en lumière la vitalité de la scène artistique française. À son meilleur ! »
Sous ses deux mandats, son énergie, son sens du collectif et de la mise en relation ont permis de multiplier les événements donnant aux membres de l’AICA l’occasion de se réunir (Prix AICA France de la critique d’art dans l’auditorium de l’INHA (Institut national d’histoire de l’art) ; Studio critique ; Rencontres aléatoires ; Entre les lignes, version critique ; Visites d’expositions ; Master Class Paris-Alger) ainsi que les partenariats avec différents acteurs privés ou institutionnels, notamment une offre de bourses ou d’appels à écriture rémunérés (Bourse Ekphrasis avec l’ADAGP ; Point de vue avec DDA ; Chroniques avec devenir-art…)
À l’instigation d’Élisabeth Couturier, The Art Newspaper France a publié régulièrement une page Point de vue, en partenariat avec le Réseau documents d’artistes (DDA) et l’AICA France – un programme d’invitation à l’écriture adressé aux membres de l’AICA France, s’appuyant sur les sites des Documents d’artistes en région, donnant à lire de jeunes critiques sur de jeunes plasticiens.
Assistante réalisatrice de Jean Eustache sur le film Une sale histoire (1977), productrice d’émissions culturelles à la radio (Les Mardis de l’expo sur France culture) et à la télévision (La case de l’oncle doc et Ligne Rouge, aux côtés de Laure Adler, sur France Télévisions ; Les petits secrets des grands tableaux sur Arte), contributrice de titres de presse, de L'Œil à Art press, Élisabeth a également signé plusieurs ouvrages, parmi lesquels, aux éditions Flammarion, Art contemporain, ce qu’il doit aux chefs-d’œuvre du passé, Design contemporain, Photographie contemporaine, ainsi qu’un livre sur les peintures et photographies de Titouan Lamazou (Gallimard).
« Journaliste, productrice, programmatrice, documentariste et critique d’art, Élisabeth Couturier a fait preuve, tout au long de sa carrière à la télévision, dans le cinéma, à la radio et dans la presse écrite, d’un goût profond pour le partage et la pédagogie afin d’ouvrir au plus grand nombre les portes du monde de l’art et de la culture, ont salué le bureau et les membres de l’AICA France dans un communiqué. Sa personnalité rayonnante et son dynamisme, son regard singulier et son sens de la formule, animés par une insatiable curiosité pour la création, ont fait d’Élisabeth Couturier une journaliste et critique d’art reconnue, admirée et aimée par ses pairs, par les artistes et par le public. Sa combativité, sa discrétion et sa dignité face à la maladie, demeurent un exemple de courage face aux épreuves de la vie. »
Un hommage sera prononcé lors du prochain prix AICA le 10 octobre.
La cérémonie publique des obsèques aura lieu ce vendredi 27 septembre à 14 h 30 à l’église Saint-Paul-Saint-Louis, 99 rue Saint Antoine, dans le 4e arrondissement de Paris.
Merci pour tout chère Élisabeth, tu vas nous manquer. Repose en paix.