La promesse de découverte d’une scène artistique méconnue est toujours une perspective passionnante. L’exposition « The Forms of Things, The Forms of Skulls, Forms of Love », présentée dans la Foire Paris Photo, au sein du Salon d’Honneur du Grand Palais, du 7 au 10 novembre 2024, invite à un rendez-vous inédit avec la création photographique lituanienne. Le titre de l’exposition est emprunté à un poème de Mantas Balakauskas.
Conçue par la commissaire d’exposition Sonia Voss, elle mettra en regard les œuvres de trois générations de photographes issues des collections de la Bibliothèque nationale de France (BnF), du Centre Pompidou et de l’Union des photographes de Lituanie, avec le soutien de la Saison de la Lituanie en France et l’Institut français.
La Société de l’Art photographique de Lituanie a été créée en 1969 à Vilnius, capitale du pays, alors République socialiste soviétique. Dès la fin des années 1970, son vice-président, le photographe Antanas Sutkus, et son confrère Aleksandras Macijauskas joignent leurs efforts pour transférer plus de 1 600 tirages de 22 photographes vers la collection photographique de la Bibliothèque nationale de France (BnF), à Paris. Ces donations successives ont permis de constituer le fonds photographique lituanien à ce jour le plus important à l’international. Reportages, portraits et chroniques du monde rural sont au cœur des images de ces photographes actifs de 1960 à 1980, témoignant d’une culture mise à mal par l’occupant soviétique, jusqu’à l’effondrement de l’URSS.
« Une scène hautement expressive et des thèmes séculaires, voire métaphysiques : relation panthéiste à la nature et au monde animal, coexistence des générations, angoisse existentielle, précisent les organisateurs. Méconnue aujourd’hui du public, l’école de photographie lituanienne a pourtant joui à l’époque d’un grand prestige à travers l’Union soviétique et au-delà, opposant aux diktats du "réalisme socialiste" une représentation sensible et polysémique du réel. »
La collection du Centre Pompidou rassemble quant à elle des images de la génération suivante, marquées par l’ironie, l'esprit de rébellion des années 1970. Via des acquisitions récentes, le fonds s’est enrichi d’auteurs de la génération des années 1980 et 1990. « En rupture avec leurs aînés, mais toujours en butte à un pouvoir coercitif malgré le "dégel" politique, ceux-ci se distinguent par leur scepticisme, leur retenue ou au contraire leur truculence. L’expérimentation, la performance, la mise en abyme du médium redessinent les contours de la photographie. Des femmes photographes s’affirment. »
Les tirages issus de l’Union des photographes de Lituanie, qui complètent cet ensemble, reflètent la vitalité de la scène contemporaine, témoins de son regard sur son histoire et le monde actuel.
Ce focus organisé dans le cadre de Paris Photo entend contribuer à mieux faire connaître l’identité singulière de ce pays à travers trois générations successives par-delà le rideau de fer. On pourra y découvrir l’art du portrait de Antanas Sutkus, l'univers de Rimaldas Vikšraitis, Violeta Bubelytė ou Janina Sabaliauskaitė. Et méditer cette phrase du philosophe lituanien Viktoras Bachmetjevas : « L’autre est toujours différent, mais jamais complètement autre ».
« The Forms of Things, The Forms of Skulls, Forms of Love », exposition présentée dans la Foire Paris Photo, au sein du Salon d’Honneur du Grand Palais, du 7 au 10 novembre 2024.