Paul Morrissey, figure de la contre-culture new-yorkaise dans les années 1960 et 1970, connu pour ses films transgressifs et coauteur d’œuvres cinématographiques avec Andy Warhol, est décédé le 28 octobre 2024 dans un hôpital de Manhattan, à l’âge de 86 ans. Dans Flesh (1968), Trash (1970) et Heat (1992), produits par la Factory, sa caméra s’attarde sur des scènes de junky s’injectant de l’héroïne ou le corps nu de l’icône gay Joe Dallesandro. Ces images sont devenues indissociables de l’atmosphère sulfureuse et créative de la Factory, où Warhol s’entoure d’un aréopage interlope, sur la bande-son du Velvet Underground.
Né le 23 février 1938 à New York, de parents catholiques irlandais, Paul Morrissey a étudié à l’université Fordham et fait un séjour dans l’armée, avant d’ouvrir l’Exit Gallery dans East Village. Il y projette ses premiers films – des courts métrages comiques en 16 mm – ainsi que ceux d’auteurs émergents, notamment Icarus (1960), premier opus d’un jeune réalisateur promis à une brillante carrière, un certain Brian De Palma.
Paul Morrissey rencontre Andy Warhol en 1965 par l’intermédiaire du poète et cinéaste Gerard Malanga. Invité à la Factory, il collabore avec le mentor pop sur des films désormais classiques, My Hustler (1965), Chelsea Girls (1966) et Lonesome Cowboys (1968). Morrissey apporte une trame narrative aux films de Warhol, dont les productions étaient jusqu’alors marquées par une approche statique radicale. Dans Sleep (1964), un plan séquence montre le poète John Giorno en train de dormir. Le film devait initialement durer huit heures… Dans Empire (1965), Andy Warhol filme au ralenti l’Empire State Building à partir d’un seul point de vue immuable.
À partir de 1966, Paul Morrissey devient le manager du Velvet Underground, dont il produit le premier disque. À la même époque, il conçoit avec Warhol Exploding Plastic Inevitable, un happening itinérant, dont la scénographie annonce avec ses jeux de lumière l’univers psychédélique du début des années 1970.
Réputé avoir la dent dure, devenu amer et réactionnaire, Paul Morrissey déclarera plus tard au New York Times que « Warhol n’a offert guère plus que son nom à leurs productions communes ». Il n'en reste pas moins associé à ces années sexe, drogue et rock’n’roll. Ses productions ultérieures – un remake comique du Chien des Baskerville (1978) ou une adaptation de la pièce Forty Deuce (1982) d’Alan Bowne portée par un Kevin Bacon encore inconnu – n’ont pas laissé un souvenir impérissable. Son dernier film, présenté à la Mostra de Venise en 2010, s’intitule News from Nowhere.
« Le travail de Paul a toujours été dans une catégorie à part, a déclaré le cinéaste expérimental Jonas Mekas au New York Times. Les membres de l’avant-garde ne comprenaient pas vraiment ses films. Et ceux qui étaient à Hollywood les trouvaient un peu trop lâches et amateurs. À l’instar de Norman Mailer dans ses premiers films, Paul a fait appel à des non-acteurs qui improvisaient. Jusqu’alors, il n’existait que des récits traditionnellement scénarisés ou du cinéma vérité de type documentaire, qui filmait les gens dans des situations réelles, en évitant toute dramatisation artificielle. »