Barbara Crane au Centre Pompidou : la photographie sous toutes ses formes
C’est sa première monographie d’envergure en Europe. Le Centre Pompidou rend hommage à la photographe américaine Barbara Crane (1928-2019) à travers une sélection de plus de 200 œuvres mettant en lumière les vingt-cinq premières années d’une carrière prolifique. Les passants de Chicago dont elle encadre les visages de néons ou qu’elle utilise comme motifs à son obsession pour la sérialité ; les courbes d’un corps qu’elle épure jusqu’à l’abstraction ; les négatifs découpés pour être assemblés dans de nouveaux récits… Son œuvre oscille entre la tradition de la straight photography américaine et un goût pour l’expérimentation hérité de ses études à l’Institute of Design de Chicago, une école résolument tournée vers l’avant-garde européenne.
« Barbara Crane », jusqu’au 6 janvier 2025, Centre Pompidou, Place Georges-Pompidou, 75004 Paris, centrepompidou.fr
Mame-Diarra Niang et le corps noir : un flou libérateur
À la Fondation Henri Cartier-Bresson, à Paris, Mame-Diarra Niang libère le corps noir des représentations que des siècles de narration occidentale lui ont imposées. La photographe lyonnaise, qui s’expose pour la première fois en France, utilise des photographies glanées sur Google Maps pendant la pandémie du Covid-19, qu’elle agrandit jusqu’à un flou abstrait. Devenu une silhouette insaisissable, le corps noir nous échappe volontairement, il refuse toute définition ou catégorisation. Ces « non-portraits » grand format où le sujet n’est qu’un halo coloré ont quelque chose de magnétique qui force à la contemplation. Ils encouragent le visiteur à vraiment regarder cette identité noire, prendre conscience que celle-ci n’est pas un bloc figé, mais qu’elle est « constituée d’expériences, de mémoires et d’oublis. »
« Mame-Diarra Niang – Remember to Forget », jusqu’au 5 janvier 2025, Fondation Henri Cartier-Bresson, 79 rue des Archives, 75003 Paris, henricartierbresson.org
À la MEP, la rencontre de la photographie, des plantes et de la science-fiction
À quoi pourrait ressembler une histoire visuelle des plantes ? C’est la question à laquelle tente de répondre cette exposition étonnante. Depuis les premiers clichés jamais réalisés, les plantes ont été pour la photographie un motif artistique autant qu’un sujet de recherche. La science et la fiction s’en sont toutes deux emparées. D’Edward Weston, Laure Albin Guillot ou encore Karl Blossfeldt à l’art post-internet, les œuvres exposées font dialoguer ces deux disciplines, dans une réflexion qui emprunte sa construction au roman de science-fiction. Elle culmine sur la présentation de The Book of Flowers, un court-métrage envoûtant pour lequel l’artiste polonaise Agnieszka Polska a eu recours à l’intelligence artificielle.
« Science/Fiction – Une non-histoire des Plantes », jusqu’au 19 janvier 2025, Maison Européenne de la Photographie, 5-7 rue de Fourcy, 75004 Paris, mep-fr.org
Céline Laguarde : le pictorialisme au féminin
L’écriture de l’histoire a sacrifié bien des femmes. Céline Laguarde (1873-1961) est l’une d’entre elles. La photographe française était pourtant célébrée de son vivant comme une des figures majeures du pictorialisme, premier mouvement artistique de l’histoire de la photographie. À travers cent trente épreuves originales, le musée d’Orsay, à Paris, répare cet oubli, révélant un corpus d’une richesse insoupçonnée et en constante évolution. Des portraits aux paysages en passant par des compositions plus symbolistes, l’exposition permet de prendre la mesure de la réputation sans précédent qu’a rencontré Céline Laguarde au début du XXe siècle, que ce soit auprès du public ou de ses pairs.
« Céline Laguarde Photographe (1873-1961) », jusqu’au 12 janvier 2025, Musée d’Orsay, Esplanade Valéry Giscard d’Estaing, 75007 Paris, musee-orsay.fr
Jérôme Prochiantz : un don exceptionnel à la BnF
La Bibliothèque nationale de France (BnF) révèle la donation exceptionnelle qu’elle a reçue du collectionneur Jérôme Prochiantz en 2023. Montrant une soixantaine de photographies parmi les 368 épreuves de la collection, l’exposition restitue l’accrochage foisonnant que ce passionné de photographie avait imaginé pour son propre appartement. Thomas Struth, Tom Baril, Dolorès Marat, JH Engström, Daido Moriyama, Joan Fontcuberta… Mêlant les genres, les registres, les styles, les provenances et les époques, ce large panorama met en lumière le regard éclectique d’un collectionneur guidé avant tout par sa sensibilité.
« Le goût de la photographie : dans la collection Jérôme Prochiantz », jusqu’au 12 janvier 2025, Bibliothèque nationale de France, quai François Mauriac, 75013 Paris, bnf.fr
L’histoire mouvementée de Taïwan : un regard engagé
La Maison Doisneau à Gentilly raconte l’histoire de Terre des Hommes, un magazine taïwanais fondé par l’écrivain Chen Ying-Zhen et édité de 1985 à 1989. À une époque de transition politique pour le pays, ce mensuel militant est porté par le regard de photographes engagés, désireux de témoigner de la réalité sociale et environnementale d’une nation en pleine démocratisation suite à la mort de son dirigeant autoritaire, Tchang Kaï-Chek. Dans le prolongement de l’exposition, le Lavoir Numérique présente une vision contemporaine de Taïwan à travers le regard du photographe Yang Shun-Fa.
« Terre des Hommes, un magazine taïwanais 1985-1989 », jusqu’au 16 février 2025, Maison de la Photographie Robert Doisneau, 1 rue Division du Général Leclerc, 94250 Gentilly, maisondoisneau.grandorlyseinebievre.fr
La Sicile de Letizia Battaglia à Tours
Letizia Battaglia (1935-2022) est une des grandes figures de la photographie documentaire sociale italienne. Photographe et activiste, elle a livré un rare témoignage sur la vie quotidienne dans une Sicile étouffée par le joug de la mafia. Au Château de Tours, le Jeu de Paume consacre une rétrospective à son œuvre prolifique – elle a réalisé plus de 500 000 photographies – qui ne se limite en rien à la Cosa Nostra. Ses images brossent un portrait effervescent de la Sicile, qu’elle dévoile dans toute sa complexité. Elles témoignent également de l’engagement de la photographe auprès des populations les plus fragiles, notamment les femmes et les enfants.
« Letizia Battaglia », jusqu’au 18 mai 2025, Jeu de Paume - Tours, château de Tours, 25 avenue André-Malraux, 37000 Tours, jeudepaume.org
D’une tuerie à un récit d’autofiction : la photographie comme outil de résilience
Quarante ans après l’assassinat de son père dans la tuerie de l’hôtel Sofitel à Avignon alors qu’il se trouvait dans la chambre attenante à la sienne, Jean-Michel André décide de convoquer la mémoire de son père et les souvenirs de cette nuit tragique dans un projet relevant de l’autofiction que le photographe a imaginé comme un film. Portée par l’Institut pour la Photographie au Musée de l’Hospice Comtesse à Lille, Chambre 207 fait dialoguer des images d’archives avec des clichés récents, pris à Avignon sur les lieux du drame ainsi que sur d’autres qu’il aurait pu traverser avec son père : la Corse, le Sénégal… Une exposition dont la puissance tient dans la subtile poésie avec laquelle elle invoque les émotions.
« Chambre 207 », jusqu’au 2 février 2025, Musée de l’Hospice Comtesse dans le cadre de la programmation hors les murs de l’Institut pour la photographie de Lille, 32 rue de la Monnaie, 59000 Lille, mhc.lille.fr
Les Abattoirs et la Galerie du Château d’Eau : un dialogue inédit
Une exposition à Toulouse propose un dialogue inédit entre les collections des Abattoirs et de La Galerie du Château d’Eau, révélant un patrimoine aussi riche que méconnu. À travers une sélection de près de 300 œuvres couvrant les grandes périodes de l’histoire de la photographie depuis le début du XXe siècle, toute la diversité du médium se raconte, depuis les pratiques documentaires jusqu’aux installations en passant par la photographie de l’intime ou des images d’archives. Hans Bellmer, Claude Batho, Mohamed Bourouissa, Brassaï, Sophie Calle, Denis Darzacq, Robert Doisneau, Ralph Gibson, Laura Henno, Ouka Leele, Robert Mapplethorpe, Gina Pane, Agnès Varda ou encore Sabine Weiss : les regards se croisent pour dresser un panorama photographique de tous les possibles.
« Ouvrir les yeux », jusqu’au 18 mai 2025, Les Abattoirs, 76 allées Charles de Fitte, 31300 Toulouse, lesabattoirs.org