À 70 ans, la Brafa affiche une belle vitalité. Malgré les années, le récent changement d’adresse (de Tour & Taxis à Brussels Expo), les vicissitudes du marché de l’art ou encore les turbulences mondiales, la Foire belge reste l’une des plus importantes en Europe dans son domaine. L’édition 2025, prévue du dimanche 26 janvier (après trois journées VIP !) au dimanche 2 février 2025, réunit quelque 130 galeries venant de 14 pays. Un nombre stable d’année en année. Remplir la Foire a-t-il été plus dur cette fois-ci, dans un contexte géopolitique et économique guère encourageant ? « Honnêtement ? Pas du tout. Je peux vous affirmer que nous sommes au complet depuis déjà quelques mois », confie Klaas Muller, le nouveau président de la Brafa.
Ce marchand de dessins et de tableaux anciens établi depuis 2000 à Bruxelles, tout près du Sablon, succède à son confrère Harold t’Kint de Roodenbeke. Il ajoute : « Nous avons même le luxe d’avoir 115 des participants de l’édition 2024 qui reviennent pour 2025, et ce sur 130 participants. En ce qui concerne les nouveaux exposants, nous avons vraiment fait un beau travail de prospection avec le conseil d’administration. Nous avons pris le parti de visiter des galeries dans toute l’Europe et de discuter avec de nombreux interlocuteurs du marché. La Brafa est un roc, et même dans les périodes plus incertaines, les collectionneurs et exposants nous accordent leur confiance. »
Constance et éclectisme
Première foire d’art et d’antiquités de l’année, elle bénéficie non seulement d’un positionnement unique dans l’agenda, mais également d’un écosystème bruxellois et belge riche en amateurs d’art, en collectionneurs passionnés, en décorateurs à la recherche du bel objet ou du beau meuble. À tous, la Brafa offre, dans une ambiance élégante et détendue qui lui est propre, une multitude de spécialités... mais aussi de prix. Pour célébrer sa 70e édition, les organisateurs ont veillé à maintenir cet éclectisme. « Je pense à l’art ancien, l’archéologie, le design, etc. La plupart de ces spécialités sont déjà bien représentées, mais nous essayons de renforcer petit à petit quelques sections. Nous voulons que la Foire soit aussi équilibrée que possible dans son éclectisme. Parmi les nouveaux exposants, nous accueillons Valerio Turchi [Rome] en archéologie grecque et romaine, mais aussi Colnaghi, DYS44, Lampronti de Londres et Lowet de Wotrenge [Anvers], ces dernières étant spécialisées en maîtres anciens. La section design sera complétée par Objects With Narratives [Bruxelles], qui propose de l’art fonctionnel et design de collection », précise Klaas Muller.
Notons également l’arrivée en art contemporain de Nathalie Obadia (Paris, Bruxelles) ainsi que d’Edouard Simoens Gallery (Knokke) orientée vers l’art d’après-guerre et contemporain. En tout, ce sont cinq nouvelles galeries françaises qui rejoignent la Foire, à savoir, outre les Parisiennes Nathalie Obadia et Templon, BG Arts (Saint-Ouen-sur-Seine), dirigée par Benjamin Gastaud, passionné par le travail de René Lalique, Capazza (Nançay), laquelle propose des pièces de Goudji, et Christophe Perlès (Paris), spécialisé en céramiques anciennes. Enfin, l’art français de l’École de Barbizon jusqu’à l’impressionnisme et au postimpressionnisme est défendu par Stoppenbach & Delestre (Londres, Paris).
Traverser le temps
Tandis que dans d’autres pays le secteur des antiquités peine parfois à se renouveler, le président de la Brafa observe une continuité encourageante chez ses exposants, dans ce domaine et au-delà. « On voit certains enfants reprendre la galerie de leurs parents, explique-t-il. Je pense par exemple au fils de Victor Werner [Alexander] ou celui d’Axel Vervoordt, Boris. Tobias Desmet travaille avec son père [Tom]. Edward Simoens ou Tyr Baudouin (Galerie Lowet de Wotrenge) sont des enfants de marchands d’art également. Dans de nombreux cas, la galerie se développe et se maintient sur plusieurs générations. C’est peut-être assez révélateur de notre métier. On peut même parler de dynasties dans certains cas comme Taménaga. »
Pour montrer l’exemple, un peu à l’instar de ce qui s’est pratiqué en France à FAB Paris ces dernières années, la Foire belge lance un projet nommé « Selected by Brafa, Designed by Gert Voorjans ». Ce dernier « réunit cinq jeunes exposants du Sablon à Bruxelles, lesquels proposent sur un même stand des œuvres de différentes spécialités, tout cela orchestré par le designer d’intérieur Gert Voorjans. Nous espérons qu’il y aura de plus en plus de jeunes gens intéressés à l’idée de reprendre l’affaire familiale ou de s’installer en tant que galeriste. Vive la jeunesse ! », s’enthousiasme Klaas Muller.
Dans un paysage mondial en pleine transformation, la Brafa semble traverser le temps et garder son cap tout en évoluant en douceur, parfois peut-être un peu contre son gré – ainsi la peinture du XXe siècle y a-t-elle pris une part croissante depuis quelques années. « Il est important pour la Brafa de conserver sa propre identité et de ne pas trop regarder ce que font les autres. Elle est une Foire organisée par des marchands d’art pour des marchands d’art, c’est une ASBL [association sans but lucratif]. L’objectif premier n’est donc pas de faire du profit, mais d’orchestrer la plus belle manifestation possible, où marchands et visiteurs sont satisfaits. La particularité de la Brafa, c’est aussi son ambiance chaleureuse, tout le monde est bienvenu. Ce qui ne nous empêche pas de continuer à viser l’excellence. Le niveau de qualité des œuvres d’art proposées est essentiel, il est finalement notre meilleure publicité. C’est un rendez-vous annuel que les amateurs d’art attendent avec impatience », souligne son président.
Après un hommage au centenaire du surréalisme en 2024, marqué par un décor inventif et poétique, la Brafa a, pour sa 70e édition, l’artiste Joana Vasconcellos comme invitée d’honneur. La Portugaise, connue pour ses sculptures monumentales et ses installations immersives, déploiera plusieurs œuvres dans les allées du Salon, lesquelles « interrogent avec humour et ironie des thèmes tels que le statut des femmes, la société de consommation et l’identité collective », selon les organisateurs. Parce que, sans cette touche d’humour, la Belgique ne serait sans doute pas ce qu’elle est.
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Brafa, 26 janvier - 2 février 2025, Brussels Expo, place de Belgique 1, 1020 Bruxelles, Belgique, brafa.be