Le 19 février 1997, Maître Binoche et la société N@rt organisaient la première vente aux enchères au monde en direct sur Internet. Était alors proposée la collection de Nicolas Philippe consacrée aux documents d’archives liés à l’affaire Dreyfus. Pour cette vacation, des pré-enchères avaient été organisées, mais les enchérisseurs avaient aussi pu intervenir en direct. Cependant, à l’issue de la vente, seuls 10 % des lots avaient finalement été emportés par des amateurs en ligne, le reste ayant été adjugé aux personnes présentes à Drouot ou actives au bout du plus traditionnel téléphone. « Internet sera bientôt aussi présent dans les ventes publiques que le téléphone aujourd’hui. D’autant plus qu’Internet permet de visualiser les lots, voire de les faire pivoter à l’écran lorsqu’ils ont été saisis en trois dimensions », avait déclaré à l’époque Me Binoche au quotidien Le Monde. Pourtant, en 1997, sans véritable haut débit, la technique n’était pas encore au point pour permettre aux internautes d’agir réellement en direct, et le commissaire-priseur était parfois ralenti de longs instants pour attendre les ordres placés en ligne.
En 23 ans, les technologies ont fait des progrès considérables et permettent aujourd’hui d’intervenir avec beaucoup de fluidité dans le jeu des enchères. Il a pourtant fallu attendre la crise mondiale du Covid-19 pour que les grandes maisons de ventes aux enchères proposent autre chose que des lots secondaires sur la toile. Le 29 juin, la première vente aux enchères du soir diffusée en direct depuis Londres par Sotheby’s a totalisé 363,2 millions de dollars avec les frais. De son côté, Christie’s a organisé le 10 juillet sa vente « One » en direct depuis Hongkong, Paris, Londres et New York qui a enregistré 420,9 millions de dollars avec les frais. Avec ces deux événements, les ventes en ligne ont pris une nouvelle dimension, grâce ou à cause de la crise. Reste à savoir si ces modèles seront reconduits. D’autant qu’une partie des lots n’a pas été emportée par des enchérisseurs mais est allée à leur garant. Encore un autre monde.