Le travail de Mimosa Echard est une forme d’archéologie matérielle. Cette praticienne, née en 1986 à Alès, propose des hybridations singulières entre l’organique, le technologique et le synthétique, explorant les strates qui existent entre le monde naturel et celui de la marchandise. Ses œuvres protéiformes, mêlant vidéo, peinture, sculpture et installation, s’inspirent de la culture pop ou de la contre-culture psychédélique. Elles sont souvent composées d’éléments hétérogènes et, notamment, de plantes médicinales ou de produits cosmétiques. Une « pharmacopée ambivalente » qui infuse entièrement sa démarche, dans laquelle le rapport au corps et aux fluides est fondamental.
Pour cette édition du prix Marcel Duchamp, elle a imaginé l’installation Escape More, dans laquelle de l’eau légèrement jaunie coule en continu devant différents objets. Mimosa Echard s’est inspirée des murs d’eau que l’on peut trouver dans les grands halls d’entreprise ou dans les spas, créant un dérivé kitsch de l’esprit zen largement marketé de nos jours. Ses œuvres nous donnent volontiers à voir le monde par le prisme de la liquidité. Celle-ci prend ici la forme d’un flux ininterrompu, évoquant ceux de notre propre société liquide, que ce soient les flux d’un capitalisme débridé ou ceux de nos corps.
Le mur d’eau d’Escape More est également un dispositif visuel remarquable. Cette « machine lacrymale de perception », ou « écran désirant », crée une véritable scission dans l’espace du regardeur, les objets exposés étant vus à travers l’eau. L’artiste nous fait entrevoir plusieurs vidéos ainsi que des sculptures, notamment son fameux « sap », un rideau de perles rehaussé d’éléments hétérogènes.
Mimosa Echard fait souvent appel à une liste pléthorique de matériaux dans ses œuvres. Escape More n’échappe en rien à cette règle, et, parmi ses composants, l’on peut trouver des gélules, des photographies argentiques, des calendulas, de la cire dépilatoire, The Financial Times, des gardénias, des noyaux de cerise... pour n’en citer que quelques-uns. En résulte ce qu’elle nomme un « objet architectural ambigu, oscillant entre le sublime et l’abject ».
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« Prix Marcel Duchamp 2022. Les nommés », 5 octobre 2022 - 2 janvier 2023, Centre Pompidou, place Georges-Pompidou, 75004 Paris.