La directrice générale de l’Unesco s’est engagée à apporter son soutien à la reconstruction du secteur culturel ukrainien après s’être rendue dans ce pays déchiré par la guerre au début du mois d’avril. Au cours de sa visite, Audrey Azoulay a déclaré au président ukrainien Volodymyr Zelensky : « Pour reconstruire mais aussi redresser la situation, il faudra investir 6,9 milliards de dollars dans le secteur culturel en Ukraine ces dix prochaines années », selon un communiqué de l’Unesco.
Audrey Azoulay a effectué une mission de deux jours en Ukraine, visitant Kiev, Tchernihiv et Odessa, réaffirmant « le soutien de l’organisation à la population [ainsi que] pour faire avancer la reconstruction du secteur culturel du pays ».
Un rapport détaillé de l’Unesco décrit le coût global considérable du redressement et de la reconstruction du secteur de la culture en Ukraine, estimant les « besoins à court terme » (2023-2026) à 2,3 milliards de dollars et les « besoins à moyen et long terme » (2027-2033) à 4,6 milliards de dollars, soit un total de 6,9 milliards de dollars.
« La première phase devrait comprendre l’évaluation et la documentation des dommages, les mesures d’urgence pour les biens culturels immobiliers et mobiliers (y compris l’enlèvement des débris), les mesures de stabilisation et de conservation des biens culturels, la gestion de l’entreposage, les plans de préparation et la conservation immédiate pour prévenir d’autres pertes et pillages », indique le rapport.
Un plan de redressement complet est nécessaire pour reconstruire le secteur, ajoute le document. « Ce plan devrait inclure l’alignement sur les normes internationales, une protection juridique et une gouvernance renforcées, le développement de protocoles et de lignes directrices pour la protection et la récupération du patrimoine culturel, et une architecture numérique complète pour documenter et gérer les biens culturels. »
Dans une série de tweets, Audrey Azoulay a commenté son itinéraire en Ukraine, soulignant les récentes mesures d’urgence de l’Unesco qui comprennent « la mobilisation de plus de 10 millions de dollars pour renforcer sa réponse à la situation d’urgence en matière d’éducation [dans le pays] ».
L’Unesco organisera également une série de sessions de formation pratique à la reconstruction sur site pour les architectes, conservateurs et urbanistes ukrainiens, a-t-elle ajouté sur les médias sociaux. L’Unesco continue de répertorier et d’évaluer les dommages subis par les sites culturels ukrainiens depuis le début de la guerre en février 2022.
Dans la ville septentrionale de Tchernihiv, Audrey Azoulay a annoncé que « l’Unesco mènera cette année avec les autorités un projet de réhabilitation complète du centre historique, inscrit sur la liste indicative du patrimoine mondial du pays ».
En février 2023, l’Unesco a décidé d’ajouter le centre historique de la ville portuaire ukrainienne d’Odessa, sur la mer Noire, à sa liste de sites du patrimoine mondial en péril. Cette ville cosmopolite, qui possède des racines grecques anciennes et a été sous contrôle ottoman pendant des siècles, est connue pour ses monuments architecturaux tels que l’opéra d’Odessa et l’escalier géant du port immortalisé dans le film muet de Sergueï Eisenstein, Le Cuirassé Potemkine, sorti en 1925.
La commission russe de l’Unesco a toutefois déclaré dans un communiqué que la décision d’accorder à Odessa le statut de site en péril était « politiquement biaisée et scientifiquement non fondée » et qu’elle n’avait été adoptée qu’avec le soutien d’une minorité. « Il convient de préciser que la seule menace qui pèse sur cette ville à l’histoire riche vient du régime nationaliste ukrainien, qui a systématiquement détruit les monuments des grands fondateurs et défenseurs d’Odessa, à savoir l’impératrice Catherine II et son entourage », a ajouté ce communiqué.
« Àla suite de l’inscription [d’Odessa], l’Unesco renforcera encore ses actions sur le terrain, en donnant la priorité à la préservation et à la numérisation du patrimoine artistique et documentaire, tout en maintenant la protection des bâtiments patrimoniaux menacés par les tirs d’artillerie », indique l’Unesco dans le prolongement de la visite d’Audrey Azoulay.
L’organisation lancera également un projet visant à améliorer la conservation des collections du musée archéologique d’Odessa grâce à un financement de la fondation de l’ambassadeur de bonne volonté de l’Unesco Marc Ladreit de Lacharrière.