À contempler la mine des marchands, aussi radieuse que le soleil parisien, et les nombreux points rouges collés sur les cartels des œuvres, le Parcours des mondes s’impose définitivement comme « Le » Salon des arts premiers le plus couru par les collectionneurs du monde entier. Il suffisait ainsi de prêter l’oreille aux propos échangés dans les petites rues de Saint-Germain-des-Prés lors de la journée d’ouverture pour se rendre à l’évidence. En dépit du climat anxiogène de la guerre en Ukraine et des débats sur les restitutions qui agitent musées et chercheurs, les objets d’Afrique et d’Océanie séduisent toujours autant un public d’amateurs et d’érudits, conservateurs de musée compris. Il est vrai que le président d’honneur de cette édition n’est autre que Stéphane Martin, l’ancien président du musée du quai Branly-Jacques Chirac, de surcroît collectionneur à ses heures…
Autre source de satisfaction, les pièces iconiques (tel un merveilleux masque Punu du Gabon à la galerie Flak, affiché au prix de 180 000 euros, ou cette saisissante figure d’autel Yoruba du Nigeria en forme de bélier, proposée par Lucas Ratton pour la somme de 280 000 euros) cohabitent avec des objets nettement plus abordables. Et c’est précisément tout le sel de ce salon à ciel ouvert que d’offrir une large palette de possibles en matière d’horizons géographiques comme de prix.
Il suffit ainsi de porter ses pas vers la galerie Alain Bovis pour acquérir un ravissant masque Eket du Nigeria pour la somme plus modeste de 15 000 euros. Nul doute que cette face lunaire, surréaliste à souhait, eût séduit André Breton ou Max Ernst !
La galerie Granier ǀ Ancient propose, quant à elle, une sélection pointue d’objets au pedigree et à l’ancienneté irréprochables (avant 1930), tel ce petit tabouret-appui-nuque Pokot (Kenya ou Ouganda) présentant d’antiques traces de restauration (2 500 euros), ou ce grand plat royal Lozi (Zambie) d’une élégance suprême (5 600 euros).
Aux amateurs de pièces fortes, l’on ne saurait trop conseiller d’aller admirer les boucliers du Bangladesh, des Philippines et d’Indonésie rassemblés par la galerie Pascassio Manfredi et dont les prix, fort raisonnables, oscillent autour de 15 000 euros.
Et si l’on prise l’art japonais, une visite chez Yann Ferrandin s’impose. Le marchand propose ainsi une sélection de masques du théâtre nô de toute beauté, dont les prix s’échelonnent, sauf exceptions, de 15 000 à 50 000 euros.
Mais que ceux qui ne peuvent délier les cordons de leur bourse se rassurent ! Libre à eux de se promener de galerie en galerie pour se faire l’œil, et d’aller visiter les nombreuses expositions thématiques du Parcours, d’une rare exigence scientifique.
Parmi nos coups de cœur, signalons la splendide exposition de la collection de Michel Vandekerckhove et de son épouse présentée par Didier Claes (à la galerie Jousse Entreprise), dans une scénographie mixant design des années 1950 et art africain et qu’accompagne un très beau catalogue (Shared Passion, éditions Fonds Mercator).
Si l’archéologie demeure le parent pauvre de cette 12e édition, on se précipitera néanmoins à la galerie bruxelloise Grusenmeyer Woliner pour y admirer des amulettes en bronze et des masques en argent des peuples de l’Oural et de Sibérie rassemblés par ces jeunes marchands au cours des dix dernières années. De pures merveilles, dont les prix démarrent, pour les plus petites d’entre elles, à 2 400 euros. Pour ouvrir encore plus l’horizon.
Parcours des mondes, jusqu’au 10 septembre 2023, Saint-Germain-des-Prés et quartier des Beaux-Arts, 75006 Paris, www.parcours-des-mondes.com