Les artistes chinois installés à Paris après 1945, comme le peintre Chu Teh-Chun, obtiennent souvent de très bons résultats aux enchères : une huile sur toile estimée entre 450 000 et 700 000 euros était d’ailleurs présentée par Aguttes ce lundi 18 décembre à Neuilly-sur-Seine. Les artistes issus de la diaspora japonaise en Europe et aux États-Unis sont, eux, moins connus. Ader propose jeudi 21 décembre une vente qui leur est consacrée. Cette vacation tentera d’apporter un nouvel éclairage sur les avant-gardes au Japon après 1950 et notamment sur l’art informel : à partir de 1955, il dessine une nouvelle ligne esthétique destinée à transcender le concept de l’« art pour l’art », vécu comme une impasse. Ce sont 86 œuvres qui seront dispersées, dont près de la moitié est issue d’une collection privée, née de l’amitié entre un amateur français, Marcel Camard, et une artiste japonaise installée à Paris, Aiko Miyawaki.
Cette dernière, « comme beaucoup d’autres créateurs de son pays, après la défaite du Japon et l’occupation américaine, a eu besoin de voyager pour s’épanouir, s’essayer à la liberté après l’enfermement. L’attrait de Paris est encore très fort au début des années 1950 et l’influence du critique d’art Michel Tapié et les expositions de la galerie parisienne Stadler vont nourrir les échanges », confie Rebecca Sack, cofondatrice en 2020, avec Aude Louis Carvès, de la galerie Louis & Sack à Paris, engagée dans la redécouverte des artistes japonais et coréen de l’École de Paris. Aiko Miyawaki n’est pas totalement inconnue en France puisqu’elle a réalisé en 1989 une sculpture monumentale, Utsuroshi, commande de l’État pour le site de La Défense. Pourtant, toujours selon la galeriste, « les œuvres de cette artiste remarquable sont très difficiles à trouver sur le marché ».
Les compositions abstraites constituent l’essentiel de son œuvre, où le geste pictural du calligraphe traditionnel s’associe aux techniques de compositions occidentales. Parmi les pièces qui illustrent parfaitement ces passerelles entre Extrême-Orient et Occident figurent une Composition bleu-vert, technique mixte sur toile réalisée en 1964 (est. 4 000-6 000 euros) ou cette autre, Composition, qui pourrait évoquer l’écorce d’un arbre et l’héritage Zen de la peinture d’Aiko Miyawaki (est. 25 000-35 000 euros).
La deuxième partie de la vente présente des œuvres qui ne proviennent pas de la collection de Marcel Camard et comprend notamment une Composition (est. 3 000-5 000 euros) ou l’huile sur toile Chevalier (est. 15 000-20 000 euros) réalisées par deux figures incontournables de cette scène franco-japonaise, proches de Michel Tapié, Kumi Sugaï et Toshimitsu Imaï.
« Avant-garde japonaise », jeudi 21 décembre, Ader, Drouot, 75009 Paris, www.ader-paris.fr