Le ministre italien de la Culture, Gennaro Sangiuliano, a affirmé qu’Israël sera bien présente à la Biennale de Venise cette année (20 avril-24 novembre) après que des milliers d’artistes et de professionnels de la culture ont signé une lettre ouverte demandant l’exclusion du pays de la plus prestigieuse manifestation artistique au monde.
Cette lettre, publiée en début de semaine par un groupe se présentant sous le nom « Art Not Genocide Alliance (ANGA) », a été signée à ce jour par plus de 19 000 personnes, dont le lauréat du Turner Prize de l’année dernière, Jesse Darling, ainsi que d’autres artistes tels que Joanna Piotrowska, Nan Goldin, Michael Rakowitz, Leila Sansour et Brian Eno. Parmi les signataires français figurent les artistes Aurélien Froment, le collectif Claire Fontaine, Pauline Curnier Jardin ou la Franco-Marocaine Yto Barrada.
ANGA se présente comme « un groupe international d’artistes, de conservateurs, d’écrivains et de professionnels de la culture réunis pour demander l’exclusion d’Israël de la Biennale de Venise ».
La lettre d’ANGA cite des précédents historiques où d’autres pays ont été bannis de la Biennale de Venise, notamment l’Afrique du Sud, exclue de 1968 à 1993 en raison de sa politique d’apartheid.
Dans le sillage de l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022, ajoute la lettre d’ANGA, « la Biennale et son commissaire ont publié de nombreuses déclarations en faveur du droit du peuple ukrainien à l’autodétermination, à la liberté et à l’humanité », accusant ensuite la Biennale de Venise de rester « silencieuse face aux atrocités commises par Israël à l’encontre des Palestiniens ». Cette année encore, la Russie ne sera pas représentée à la Biennale.
Dans une déclaration publiée le 27 février et intitulée « Non à l’intolérance. Oui à Israël », le ministre italien de la Culture Gennaro Sangiuliano a condamné cette lettre, la qualifiant de « honteuse », et a ajouté : « Ma solidarité et ma compassion les plus profondes vont à l’État d’Israël, à ses artistes et à tous ses citoyens. La Biennale de Venise sera toujours un espace de liberté, de rencontre et de dialogue et non un espace de censure et d’intolérance. La culture est un pont entre les peuples et les nations, pas un mur de séparation ».
« La culture n’est pas un "pont entre les peuples et les nations" lorsqu’une nation est impliquée dans l’élimination d’une autre… La liberté de pensée et l’expression créative ne sont menacées que lorsque les artistes se détournent de la réalité », a réagi ANGA dans une déclaration en ligne.
Le 28 février, la Biennale de Venise a finalement publié ce communiqué : « En ce qui concerne la participation à l’Exposition internationale d’art des pays présents dans les pavillons des Giardini, de l’Arsenale et de la ville de Venise, la Biennale de Venise tient à préciser que tous les pays reconnus par la République italienne peuvent demander de manière autonome à participer officiellement. Par conséquent, la Biennale ne peut prendre en considération aucune pétition ou appel visant à exclure la participation d’Israël ou de l’Iran à la 60e Exposition internationale d’art .
La Biennale note, en outre, que la décision de fermer le pavillon russe à la 59e Exposition internationale d’art en 2022 a été prise par le commissaire et le conservateur désignés par le ministre de la Culture de la Fédération de Russie, qui a annoncé qu’elle ne participerait pas à la 60e Exposition internationale d’art à venir.
En ce qui concerne l’exclusion de demandes de participation en tant qu’événements collatéraux de la 60e Exposition internationale d’art, nous aimerions préciser que sur 72 projets éligibles, deux comportaient la participation d’artistes palestiniens, dont l’un a été sélectionné parmi 30 événements collatéraux approuvés à l’entière discrétion du commissaire Adriano Pedrosa, dont la décision artistique est définitive et irrévocable.
Des artistes palestiniens figurent également dans la 60e Exposition internationale d’art organisée par Adriano Pedrosa, comme l’indique la liste des artistes publiée par la Biennale le 31 janvier 2024. »
L’artiste Ruth Patir représentera cette année Israël. Son projet, intitulé « Fertility Pavilion » (pavillon de la fertilité), porte sur la maternité contemporaine. Les commissaires du pavillon sont Mira Lapidot et Tamar Margalit.
« Nous avons été abasourdis et terrifiés par les horribles attaques du 7 octobre menées par le Hamas, qui ont brutalement brisé la vie de tant de membres de notre famille, d’amis et de connaissances, ont déclaré Tamar Margalit, Ruth Patir et Mira Lapidot à ARTnews en octobre 2023. À notre immense chagrin s’ajoute une profonde inquiétude face à l’escalade de la crise humanitaire à Gaza et à la perte tragique de vies humaines, ainsi qu’à ce qui reste à venir ».