Marcel Pascual, collectionneur d’œuvres d’artistes confirmés et émergents, a décidé en 2011, avec sa femme Pilar Forcada (décédée en 2021), de promouvoir la jeune scène espagnole. Après deux expositions qui ont tourné en Espagne, puis en Italie, « ART Situacions III » a été présentée en 2023 dans le cadre de la foire ARCO à Madrid. Cette sélection de six artistes femmes et quatre hommes, réalisée par un comité de quatre historiens d’art, est accueillie jusqu’au 7 avril 2024 dans l’immense espace de la Chaufferie de la Fondation Fiminco à Romainville.
Répondant à Marcel Pascual qui considère que l’aide matérielle aux artistes est une « obligation morale » pour l’homme d’affaires qu’il est, la jeune directrice de la Fondation Fiminco, Katharina Scriba, estime que « cette exposition nous réunit autour d’une volonté commune : soutenir la création contemporaine ».
Disons-le d’emblée : les œuvres des femmes artistes sont plus convaincantes et techniquement plus complexes que celles des hommes.
Les sculptures de textiles entrelacées, solidifiées par le plâtre, imbibées de pigments couleurs pistache ou lavande de l’Espagnole Elena Aitzkoa (née en 1984) impressionnent par leurs formes apparemment laissées au hasard. Elles sont disposées au sol et captent l’œil des visiteurs.
Nos yeux sont aussi vite fascinés par les vidéos et peintures sur aluminium issues et modifiées par l’intelligence artificielle d’une machine qui est liée au corps de la Française Salomé Chatriot (née en 1995). L’image de l’anatomie extérieure et intérieure de l’artiste, sa respiration et les battements de son cœur sont constamment modifiés numériquement, évoquant le végétal et l’organique déshumanisé, dans des couleurs éclatantes.
Les énigmatiques machines légères, constituées de tiges de métal noir, de la Française Marie-Luce Nadal (née en 1984), dégagent de la vapeur, voire des nuages, et même du bruit pour leurs « Coups de foudre ». En prenant l’expression française au pied de la lettre, l’artiste assure avec son sourire qu’elle sait de quoi elle parle.
Dans un registre plus grave, son compatriote Benoît Piéron (né en 1983) a été contaminé par le virus du Sida à la suite d’une transfusion sanguine. Il utilise des draps d’hôpital comme support, pour y peindre de petits formats peu convaincants. Il se révèle en revanche excellent dessinateur sur l’abat-jour d’un lampadaire, où il déploie tout son imaginaire, avec des chauves-souris aux corps de fleurs, entourées de pétales, le tout structuré graphiquement par des fioles de sérum. L’Espagnol Pablo Capitán del Rio (né en 1982) se sert également de matières de récupération pour une œuvre qui s’inscrit dans la tradition de l’arte povera, en disposant des vêtements en coton pliés comme des papiers d’archives au sol, et retenus par des bandes d’acier noir. Tachés, ces assemblages produisent un effet visuel évoquant le marbre.
Les autres artistes du parcours sont les sculptrices Nora Aurrekoetxea et Lucía Bayón, la vidéaste Elsa Brès, le photographe Aleix Plademunt et le peintre-sculpteur Yoan Sorin.
Pour cette troisième édition, ART Situacions a financé la production d’une œuvre de chaque artiste. Le comité de sélection est constitué de María de Corral, Chus Martínez, Lorena Martínez de Corral et Vicente Todolí.
Cette exposition s’inscrit dans l’ambitieux programme de la Fondation Fiminco qui souhaite s’inscrire à terme dans le plus grand centre culturel d’Europe, riche déjà des réserves du FRAC Île-de-France, des espaces de plusieurs galeries, ainsi que des ateliers d’une douzaine d’artistes boursiers. Une salle de spectacle ouvrira bientôt en partenariat avec le Théâtre du Châtelet. Son directeur, Olivier Py, a d’ailleurs signé en décembre 2023 un contrat avec le président de la Fondation Fiminco, Gérald Azancot, pour sceller cette collaboration.
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« ART Situacions III », du 29 février au 7 avril 2024, Fondation Fiminco, 43 Rue de la Commune de Paris, 93230 Romainville