Le Gallery Weekend Berlin (GWB) a lancé sa 20e édition ce vendredi 26 avril 2024. Si la capitale allemande, qui s’embourgeoise rapidement, n’est plus aussi bon marché ni aussi libre que lors de la création de la manifestation en 2005, cette édition anniversaire, qui compte 55 participants, accueille un grand nombre de nouveaux espaces et de nouveaux visages.
Parmi eux, figure la toute nouvelle directrice du GWB, Antonia Ruder. Elle dirige ici sa première édition depuis qu’elle a succédé, en mai 2023, à Maike Cruse, partie diriger Art Basel à Bâle. « Comme Berlin n’a plus de foire d’art, son Gallery Weekend est encore plus important, explique Antonia Ruder. Chaque année, il démontre qu’il est important de s’y rendre. »
En effet, un certain nombre de collectionneurs internationaux sont attendus dans la capitale allemande ce week-end, ce qui en fait un moment clé du marché. Sans être officiellement affiliée au GWB, la méga galerie Pace profite de l’événement pour ouvrir un pop-up à Berlin jusqu’au 26 juin avec la première exposition européenne de la peintre Maysha Mohamedi, basée à Los Angeles. Cet espace est le premier de la galerie à Berlin, qui y a établi un bureau l’année dernière. Le pop-up est situé dans le quartier de Schönenberg, près des galeries Esther Schipper, Judin et Max Hetzler. Laura Attanasio a rejoint l’enseigne en juin 2023 pour diriger son nouveau bureau berlinois après avoir travaillé comme associée chez König, période durant laquelle elle a travaillé avec Elmgreen & Dragset, Katharina Grosse et Alicja Kwade. Tous ces artistes ont quitté König à la suite des multiples accusations de conduite inappropriée visant son fondateur, Johann König, dans un article publié par le journal Die Zeit en 2022. Ce dernier a réfuté ces faits. La galerie König avait cessé de participer au GWB avant la publication de l’article de Die Zeit.
Pace envisage-t-elle d’ouvrir un espace permanent à Berlin ? « C’est certainement une possibilité, répond Laura Attanasio. Pour l’instant, nous voulons nous installer progressivement et travailler à l’échelle du projet. » L’arrivée de Pace à Berlin dont le marché a autrefois été difficile, intervient alors que le paysage culturel de la ville continue de se modifier en raison de l’augmentation rapide des loyers. « La scène artistique berlinoise a traversé une période difficile ces derniers temps, poursuit Laura Attanasio. La ville est plus riche et beaucoup d’artistes sont partis, mais il n’y a pas eu assez de collectionneurs à Berlin pour atteindre une masse critique de grandes galeries commerciales, comme c’est le cas à Paris. »
Ces changements se font sentir dans le quartier de Kreuzberg, où deux galeries voisines de taille moyenne, Klemm’s et Soy Capitan, quittent leur espace actuel après avoir été expulsées. Leur propriétaire vend le bâtiment à des promoteurs immobiliers.
Klemm’s, qui occupe ses espaces de la Prinzessinnenstrasse depuis dix ans, déménage dans des locaux plus vastes sur la Leipzigerstrasse, au sud de Mitte, à côté d’un autre participant au GWB, Sweetwater. Son exposition inaugurale dans ce nouvel espace présente un solo de sculptures de l’artiste allemand Jonas Rossmeisl.
« Trouver de superbes espaces bon marché à Berlin n’est plus la norme », regrette Sebastian Klemm. C’est pourquoi il est particulièrement enthousiaste à l’idée d’emménager dans un nouveau lieu, un grand espace au premier étage d’un immeuble de l’époque de la RDA. « Les initiatives de l’État ne fonctionnent pas à Berlin ; ce sont toujours les acteurs privés qui font avancer les choses ici », constate quant à elle Silvia Bonsiepe, l’associée de Sebastian Klemm, à propos du GWB et de son succès au fil des ans.
Pendant ce temps, la galerie Soy Capitan, fondée en 2008, déménage à Kreuzberg, sur la Lindenstrasse, à proximité d’un autre participant au GWB, Buchmann. L’enseigne expose des peintures et des dessins de l’artiste berlinois Reinhard Voigt, réalisés entre 1969 et 2001. Bien que très attachée à son ancien emplacement, la fondatrice de la galerie, Heike Tosun, espère que le nouvel espace, plus grand, de Soy Capitan « augmentera la visibilité de la galerie et lui permettra de toucher un public plus large ».
La galerie Molitor, créée en 2022, participe pour la première fois au GWB en exposant de grandes peintures abstraites de l’artiste berlinoise Lisa Jo. Et pour de nombreux visiteurs, ce GWB sera l’occasion de découvrir le nouvel espace de la galerie Ebensperger à Kreuzberg, inauguré en octobre 2023, et situé dans un ancien gazomètre du XIXe siècle, utilisé par la suite comme abri antiaérien pendant la Seconde Guerre mondiale. Le temps de ce week-end uniquement, la galerie expose des sculptures de Gundula Shulze et de Franz West provenant de la collection Diehardt à Graz, en Autriche.
Les piliers berlinois répondent aussi présents à cette édition anniversaire du GWB, à l’exemple de Spruth Magers. La galerie accueille une exposition collective de cinq femmes artistes d’Asie de l’Est, dont aucune n’est représentée par la galerie. Il s’agit notamment de l’étoile montante Mire Lee, de Corée du Sud, invitée à intervenir dans le Turbine Hall de la Tate Modern à Londres cet automne.
Esther Schipper, quant à elle, présente une exposition d’œuvres de Julius von Bismarck, qui a récemment rejoint la galerie. Leur thème porte sur les loups et la mythologie, s’inspirant de la Louve capitoline, sculpture en bronze exposée aux musées du Capitole à Rome. Von Bismarck est également représenté par une autre galerie berlinoise, Alexander Levy, qui organise une exposition concomitante dans ses locaux de Moabit.
Gallery Weekend Berlin, 26 au 29 avril 2024, Berlin, Allemagne.