L’étonnante histoire du manuscrit de L’Étranger
C’est l’une des œuvres phares de la littérature mondiale du XXe siècle, le troisième ouvrage francophone le plus lu dans le monde : un manuscrit de L’Étranger d’Albert Camus sera présenté aux enchères par Tajan ce mercredi 5 juin 2024. Il s’agit d’un document un peu particulier puisqu’il a été rédigé en 1944, soit deux ans après la publication du roman, mais antidaté par son auteur « avril 1940 ». Pourrait-il alors s’agir d’un faux ? Cette hypothèse a vite été abandonnée par les spécialistes. Ou d’une farce intéressée ? Selon les éléments apportés par l’experte Ségolène Beauchamp au catalogue de la vente, la situation financière de Camus est tendue en cette année 1944 : les revenus tirés de ses écrits sont alors maigres. Malgré tout, L’Étranger suscite beaucoup d’intérêt dans les milieux littéraires et intellectuels. Il est aujourd’hui reconnu que ce manuscrit « retravaillé » a été rédigé sous la dictée de la compagne d’André Malraux, Josette Clotis, et semblait destiné à enrichir la bibliothèque d’un riche collectionneur. Cette histoire originale n’enlève en rien à l’intérêt de ce document, annoté et illustré de dessins de Camus, estimé entre 500 000 et 800 000 euros. Il possède en outre une reliure réalisée en 1953 par Pierre-Lucien Martin.
« Livres et manuscrits », mercredi 5 juin 2024, Espace Tajan, 37, rue des Mathurins, 75008 Paris
Collection Jean Roudillon, la passion des arts premiers
Le nom de Jean Roudillon est intimement lié au monde des arts premiers. Dans ses mémoires, dont des extraits figurent dans le catalogue de la vente de sa collection par Ader, il évoque une naissance « en 1923 à Montmartre, entouré de fétiches africains et d’une tête réduite des indiens Jivaros ». Son père, brocanteur au marché Biron à Saint-Ouen, fournit en « Art Nègre », comme on l’appelait alors, le célèbre antiquaire Charles Ratton. Jean Roudillon est un passionné mais il n’est pas vraiment collectionneur. C’est un marchand, un antiquaire qui a connu l’âge d’or du métier dans lequel « les objets ne manquent pas, seulement l’argent pour les acheter ». Il en a les archétypes : un ego relativement prononcé – « je suis la mémoire vivante de ce XXe siècle », disait-il, mais surtout une pensée universaliste qui l’emmène un peu partout, en Europe sur les traces d’objets Haute Époque, sur les rives de la Méditerranée, et bien sûr en Afrique. Parmi les temps forts de cette collection, on note une tête cycladique vers 2 800 avant J.-C. (est. 12 000-18 000 euros), une spatule à chaux des îles Trobriand en Papouasie (est. 40 000-60 000 euros) ou un rare masque Gouro de Côte d’Ivoire (est. 150 000-250 000 euros).
« Collection Jean Roudillon », jeudi 6 juin 2024, Ader, Hôtel Drouot, 75009 Paris
Suite de la collection de Geneviève et Jean-Paul Kahn chez Piasa
Après deux opus proposés par la maison de ventes Pierre Bergé en 2019 et 2020, c’est au tour de Piasa, mais toujours avec l’expert Fabien Béjean-Leibenson aux manettes, de présenter la troisième partie de la collection de Geneviève et Jean-Paul Kahn. Près de soixante-dix œuvres témoignent, là encore, de la passion du couple pour le surréalisme. On retrouve dans cette vacation les artistes stars du mouvement dont on célèbre cette année le centenaire : Marcel Duchamp (L.H.O.O.Q, 1919-1964, estimé de 200 000 à 300 000 euros), Man Ray (Le Beau Temps, 1939, estimé entre 60 000 et 90 000 euros) ou Max Ernst (Untitled (Paysage), 1956, estimé 60 000-90 000 euros).
La place occupée par les artistes femmes est importante et comprend une huile sur toile, The Other Side of the Square, 1947, de la peintre américaine Kay Sage (est. 100 000-150 000 euros), un fusain rehaussé à la craie par Valentine Hugo (Isabelle d’Égypte, 1933, est. 8 000-12 000 euros) ou encore une œuvre importante de Dorothea Tanning, Les Trois Garces, 1953, estimée 300 000-400 000 euros. La collection permet aussi d’évoquer l’intérêt des Kahn pour l’expressionnisme abstrait américain (Jackson Pollock, Untitled, vers 1943-1944, est. 150 000-250 000 euros) ou le pop art avec un autoportrait d’Andy Warhol, Self-portrait (indo orange red), 1967, estimé de 300 000 à 400 000 euros.
« La collection Geneviève et Jean-Paul Kahn, du Surréalisme au Pop Art », mercredi 5 juin 2024, Piasa, 118 rue du Faubourg Saint-Honoré, 75008 Paris, www.piasa.fr