Sotheby’s a fait volte-face au sujet de la structure de ses frais, dernière décision en date après une année décevante pour la maison de ventes aux enchères.
Un courriel adressé à la fin du mois de décembre par la maison de vente aux enchères à ses clients précise ce qui suit : « Vous vous souvenez peut-être qu’il y a dix mois, nous avons annoncé une initiative audacieuse visant à réduire la commission acheteur à 20 % sur la quasi-totalité de nos ventes » – les œuvres d’une valeur supérieure à 6 millions de dollars étant soumises à des frais de 10 % – ainsi que proposer des conditions financières fixes pour les vendeurs.
Selon Charles Stewart, directeur général de Sotheby’s, cette mesure a naturellement été bien accueillie par les acheteurs. Cependant, la rationalisation des frais de vente, qui s’élèvent à 10 % pour les œuvres estimées jusqu’à 5 millions de dollars, et ont été plafonnés à 50 000 dollars dans le but de réduire les négociations individuelles, « s’est avérée moins attrayante pour les vendeurs potentiels ».
Aussi, à partir du 17 février 2025, les frais acheteurs redeviendront chez Sotheby’s peu ou prou identiques à ceux qui étaient en vigueur auparavant, à savoir 27 % pour les œuvres jusqu’à 1 million de dollars, 22 % pour les œuvres entre 1 et 8 million(s) de dollars et 15 % pour les œuvres au-delà de 8 millions de dollars.
Les frais imputés au vendeur reviendront quant à eux à des « conditions sur mesure », précise le courrier électronique.
La nouvelle structure prévoit encore quelques ajustements. Sotheby’s confirme que l’ancienne « prime de frais généraux » de 1 % sur tous les lots achetés est supprimée (bien qu’elle subsiste pour les vins et les spiritueux), tandis que la « commission de succès » (« success fee » introduite pour les vendeurs à hauteur de 2 % du prix d’adjudication si l’œuvre dépassait l’estimation haute d’une œuvre est maintenue).
Charles Stewart reste fidèle à la logique qui sous-tend ces changements. « Nous n’avons absolument pas peur d’essayer des choses qui remettent en question les conventions, de manière à en faire profiter le marché et à élargir l’accès à des publics de plus en plus nombreux », nous explique-t-il. Le système mis en place « conduit à un marché confidentiel », ajoute-t-il.
L’objectif, selon le courriel, était d’apporter « transparence, simplicité et équité sur des frais qui ont toujours été d'une complexité intimidante ». Mais en fin de compte, précise le directeur général, « le marché a renforcé le statu quo ». La modification des frais de vente s'est avérée particulièrement peu attrayante pour « les personnes habituées à la consignation et pour celles qui ont des conseillers en art », ajoute-t-il.
Selon lui, le calendrier des changements a également joué en leur défaveur, puisqu’ils sont intervenus « alors que le marché était confronté à un problème d’offre beaucoup plus important ». L’incertitude entourant les élections américaines, associée aux inquiétudes persistantes concernant l’environnement géopolitique au sens large, a entraîné un environnement de vente beaucoup plus compliqué en 2024. « Nous devons être réactifs. Nous avons essayé, nous avons appris et nous avons écouté », résume Charles Stewart.
Ce dernier ne se prononce pas sur la question de savoir si sa rivale Christie’s a récupéré plus de lots juteux grâce à la structure modifiée de Sotheby’s cette année. Il admet cependant que l’un des points d’achoppement était que le montant entre le prix d’adjudication et le total payé par l’acheteur dans chaque maison – la base pour calculer les mesures incitatives à destination des vendeurs telles que reverser une partie de la prime acheteur – était différent (vraisemblablement inférieur), ce que les consignateurs ont trouvé « déroutant ».
Christie’s a annoncé fin décembre que le total de ses ventes aux enchères pour 2024 serait de 4,2 milliards de dollars (en baisse de 16 %), tandis que Sotheby’s devrait réaliser un total de 3,5 milliards de dollars (en baisse de 35 %, et ce sans compter les ventes de voitures), selon les analystes d’ArtTactic. Si l’on ajoute les ventes privées, le total de Christie’s pour 2024 s’élève à 5,7 milliards de dollars, soit une baisse de 6 %, tandis que Charles Stewart s’attend à ce que le total de Sotheby’s ait chuté d’environ 2 % pour atteindre approximativement 6 milliards de dollars, en incluant également les ventes de voitures par l’intermédiaire de RM Auctions. Selon lui, la modification des frais « n’a pas eu d’impact significatif sur nos marges », Sotheby’s ayant réduit ses effectif de 150 personnes sur un total de 1 900 courant 2024.