L’artiste britannique et tanzanienne Lubaina Himid représentera le Royaume-Uni à la 61e Biennale de Venise l’an prochain. Elle raconte avoir « éclaté de rire, à la fois de joie et d’incrédulité, lorsque [elle a] appris cette formidable invitation ».
Emma Dexter, directrice des arts visuels à la British Council Collection et commissaire du pavillon britannique à la Biennale de 2026, déclare que l’artiste « repousse les limites de la peinture par le son et les installations sculpturales, ainsi qu’en incorporant de nouveaux matériaux, textures, narratives et formats dans son travail ».
Les dessins, tableaux et installations de cette pionnière du Black British Art Movement, née à Zanzibar, se concentrent surtout sur l’histoire coloniale, le racisme et « la participation des personnes noires dans la vie culturelle européenne de ces derniers siècles », précise-t-elle. En 2017, lorsqu’elle reçoit le Turner Prize, Ben Luke écrit dans The Art Newspaper que « ses peintures et ses tableaux sculpturaux et picturaux, vecteurs de puissants messages politiques et sociaux et empreints d’un sens de l’absurdité et d’un humour tordu, sont depuis des décennies une constante de la scène artistique britannique, bien qu’ils n’aient pas toujours reçu la reconnaissance qu’ils méritaient ».
Artiste, elle est également commissaire pour de nombreuses expositions, comme « The Thin Black Line », en 1985 à l’Institute of Contemporary Arts (ICA) de Londres – elle y organise l’été prochain une exposition lui faisant écho, « Connecting Thin Black Lines 1985-2025 » (du 24 juin au 7 septembre 2025). Lubaina Himid a étudié la scénographie à la Wimbledon School of Art de Londres : elle a rendu hommage à ce premier amour qu’est la scène en 2021-2022, lors d’une exposition monographique à la Tate Modern, le plus grand de ses solo shows à ce jour. Les visiteurs y étaient entraînés, entre tableaux et installations, dans les coulisses et sur les planches. En faisait partie notamment The Fashionable Marriage (1986), l’une de ses installations les plus célèbres, décor de personnages en contreplaqué faisant référence aux gravures de William Hogarth, Marriage à la Mode (1743-1745) tout en critiquant Margaret Thatcher et Ronald Reagan.
Parmi ses œuvres, on notera également deux projets-clefs, représentatifs son travail : une commande réalisée pour la Rapid Response Unit de Liverpool, qui interrogeait la manière dont le Guardian faisait le portrait des personnes noires, et Old Boat, News Weather, réalisé en 2021 pour la Government Art Collection (GAC) britannique, représentant un navire transportant une hutte.

Lubaina Himid, Le Rodeur : The Captain and the Mate, 2017-2018.
Courtesy de l'artiste et d'Hollybush Gardens. Photo : Andy Keate
À la dernière Biennale de Venise, le Royaume-Uni était représenté par John Akomfrah, artiste et cinéaste dont les installations vidéo explorent le changement climatique et les questions post-colonialistes. En 2022, Sonia Boyce, qui représentait nos voisins britanniques, avait remporté le Lion d’or de la meilleure exposition nationale.
L’an dernier, Koyo Kouoh, 57 ans, a été nommée commissaire de la Biennale de Venise 2026. Camerounaise et suisse, élevée tant au Cameroun qu’en Suisse, elle sera la première Africaine à organiser l’évènement – le choix de Lubaina Himid par la Grande-Bretagne y fait joliment écho.