Un quart de siècle après son ouverture, le musée d’art et d’histoire du Judaïsme (mahJ) va s’agrandir. Le projet du mahJ, lancé en 1985, a pris son essor en 1988 avec la création d’une association de préfiguration et la constitution d’un fonds réunissant celui du musée d’Art juif de Paris, la donation faite à l’État en 1890 de la collection d’Isaac Strauss, acquise à la mort du compositeur par la baronne Nathaniel de Rothschild et déposée au Musée de Cluny – Musée national du Moyen Âge, ainsi que des dépôts de la Fondation du judaïsme français et de différents musées et associations, complétés par des acquisitions. Cette collection – l’une des plus belles rassemblant œuvres et objets sur le judaïsme à l’échelle internationale – constitue le fondement du projet du musée.
Lors de l’inauguration du mahJ au sein de l’hôtel de Saint-Aignan rénové, dans le quartier du Marais, à Paris, le 30 novembre 1998, le président de la République Jacques Chirac avait déclaré : « Ici, l’on mesure combien le judaïsme a enrichi la vie culturelle des sociétés qui l’ont accueilli. Ici, chacun comprend tout ce que notre pays doit aux juifs de France ». Avant de conclure son discours par ces mots : « Depuis tant et tant d’années, nous rêvions d’un grand musée du judaïsme qui ne serait pas seulement le conservatoire du passé mais aussi le creuset d’une société fraternelle, où chacun puisse s’épanouir et vivre heureux, sans distinction d’origine, de race, de religion, de croyance. Nous rêvions d’un lieu où s’enseignent la tolérance, le dialogue, la diversité, la grandeur et la richesse des sociétés qui reconnaissent le meilleur de chacun. Un lieu d’une telle puissance évocatrice qu’il fasse tout naturellement reculer les démons du racisme, de l’antisémitisme et de la xénophobie. Un lieu où s’impose l’acceptation de l’Autre, où sa différence ne serait pas perçue comme une menace mais comme une chance. Ce lieu, nous l’avons aujourd’hui avec notre musée d’art et d’histoire du Judaïsme. Souhaitons-lui plein succès. »
Porté depuis 2015 par l’équipe du musée, le projet d’extension, doté d’un budget de 22 millions d’euros, est conduit par la Ville de Paris, maître d’ouvrage – et propriétaire depuis 1962 (dans le cadre du plan de sauvegarde du Marais) du bâtiment historique édifié de 1644 à 1650 pour Claude de Mesmes, comte d’Avaux, par l’architecte Pierre Le Muet (1591-1669) –, avec le concours de l’État, de la Région Île-de-France et de donateurs réunis par la Fondation Pro mahJ.
Le ministère de la Culture a annoncé, le 30 janvier 2025, un soutien financier supplémentaire exceptionnel de 3,5 millions d’euros en faveur de ce projet d’extension et de réaménagement du musée associatif, reconnu « musée de France » depuis 2003. Cet engagement, qui porte la contribution totale de l’État à 6,5 millions d’euros, « constitue un soutien majeur de l’État au projet du musée d’art et d’histoire du Judaïsme et à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme », précise un communiqué de la Rue de Valois, « compte tenu de la richesse des collections et de l’importance de la politique culturelle et éducative menée par le musée d’art et d’histoire du Judaïsme pour la diffusion de la connaissance du judaïsme et du vivre-ensemble ».
Outre la refonte complète de la muséographie, le chantier va permettre l’agrandissement des espaces dévolus aux collections permanentes et temporaires. Le parcours permanent des collections passera ainsi de 907 à 1 226 m², « donnera toute sa place à la longue histoire de la présence juive en France, de l’Antiquité à nos jours, et permettra la découverte du judaïsme comme culture vivante, profondément inscrite dans l’histoire européenne », précise le musée, qui ajoute : « Il s’enrichira de salles sur les juifs des marges du royaume à l’époque moderne, l’apogée du franco-judaïsme, l’immigration juive dans l’entre-deux-guerres, le sauvetage de juifs de France sous l’Occupation et les résistances juives, l’après-guerre et l’arrivée des juifs d’Afrique du Nord en Métropole, ainsi que sur la présence aujourd’hui en France de la plus importante population juive dans le monde après les États-Unis et Israël. » Les surfaces dévolues aux expositions temporaires passeront, quant à elles, de 455 à 609 m². En outre, le chantier concernera le clos et le couvert, l’étanchéité, l’isolation, la mise aux normes climatiques et l’accessibilité (ascenseurs, cheminement PMR dans la cour).
La Ville de Paris met à disposition de l’institution l’école désaffectée du clos des Blancs-Manteaux, à proximité de l’hôtel de Saint-Aignan. S’y installeront la bibliothèque et les bureaux du musée, libérant ainsi 600 m² désormais affectés à la présentation des œuvres.
Le mahJ devrait fermer ses portes pour travaux fin 2027, pour rouvrir au printemps 2030. Une importante campagne de collecte de fonds permettra d’abonder les crédits publics mobilisés sur le projet, précise le musée.