L’artiste franco-anglais Marc-Camille Chaimowicz expose au premier étage du WIELS, qu’il aménage en trois ambiances différentes constituant autant d’installations. Avec Celebration ? Realife Revisited (1972), le visiteur remonte dans le temps en entendant les morceaux des Rolling Stones et de David Bowie qui en forment l’environnement sonore. Il s’agit de l’une des premières installations visuelles et musicales de l’artiste, rarement montrée. C’est en quelque sorte une œuvre prémonitoire abordant des questions telles que les frontières entre l’art et le design ou entre l’espace public et l’espace privé. Marc-Camille Chaimowicz se mue ici en directeur artistique et scénographe. Une posture encore plus manifeste dans The Hayes Court Sitting Room (1979-2023), une reconstitution de son logement londonien. Entre décor de théâtre et lieu de vie, l’installation intrigue, car le visiteur peut ressentir une impression de voyeurisme en pénétrant sans y faire a priori attention dans l’intimité de son occupant et de ce qu’il veut bien nous dévoiler. Dans la séquence suivante, Dear Zoë (Emma Bovary collages) (2020-2023), c’est aux pensées de l’artiste que le visiteur est cette fois confronté, à travers une quarantaine de collages entamés durant la pandémie. Prenant pour point de départ la figure d’Emma Bovary, Marc-Camille Chaimowicz revisite le personnage à l’aulne de nos problématiques actuelles, en combinant fragments de magazines de mode, extraits d’ouvrages et reproductions d’œuvres d’art.
Dès l’entrée dans l’exposition de l’artiste belge d’origine grecque Danai Anesiadou, on sent un radical changement d’ambiance. Une immense moquette rouge recouvre l’intégralité de la salle, sur laquelle sont disposés de nombreux objets en apparence issus de l’univers domestique, mais comme transformés par un designer contemporain aimant le baroque et la couleur. Au centre se détachent deux châssis en bois qui, lorsque l’on s’en approche, s’avèrent être de véritables guillotines. Elles ont été offertes à Danai Anesiadou par le créateur américain Ryan Cullen, dont les peintures et les objets dénoncent les violences et autres vicissitudes engendrées par les systèmes politiques néo-libéraux. L’artiste belge recourt elle aussi à une scénographie spectaculaire pour générer des ambiances déconcertantes faites de rites de passage, de moments de pause et d’introspection, de mouvements de va-et-vient, bref de constants allers et retours entre mise en scène et réalité. Les objets du quotidien comme les plus précieux sont solidifiés en assemblages exubérants constitués de résine et de matières diverses, à la façon d’une dérive fantastique du meilleur du pop art ou du Nouveau Réalisme. Entrecroisant les références entre sa propre existence, le cinéma, les sciences occultes et l’Antiquité grecque, Danai Anesiadou dresse un état du monde certes personnel, mais qui ne laissera pas insensible le visiteur.
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« Marc-Camille Chaimowicz. Nuit américaine », 17 février - 13 août 2023; « Danai Anesiadou. D Possessions », 28 janvier - 23 avril 2023, WIELS, Centre d’art contemporain, 354 avenue Van Volxem, 1190 Bruxelles.