Alors que son troisième sexennat arrive à son terme à la fin de ce mois d’avril et malgré une évaluation favorable de son travail par les autorités de tutelle, Michel Draguet a décidé de ne pas briguer un quatrième et ultime mandat. Suite au long conflit interne qui l’oppose à une bonne partie de ses équipes et qui a été jeté sur la place publique en décembre 2022 (lire The Art Newspaper édition française de février 2023), une forte défiance entre les parties s’en est ensuivie. La situation était devenue quasi intenable pour lui, il en tire aujourd’hui les conséquences. « À un moment donné, il faut réfléchir et éviter le mandat de trop. Il m’a semblé que le mandat auquel je me destinais pourrait être de trop », a-t-il déclaré.
Ses opposants doivent se réjouir de cette issue, conséquence de leur campagne médiatique savamment orchestrée au moment de l’évaluation du travail de leur directeur. Elle aura réussi à le déstabiliser. Au grand soulagement du directeur cependant, l’autorité de tutelle souligne que « le processus d’évaluation n’a mis en évidence aucune preuve matérielle permettant de corroborer les accusations de racisme, d’homophobie ou de sexisme telles que relayées par la presse », et proférées par ses détracteurs. Pour Michel Draguet, l’une des conclusions à tirer de cette période délicate est « une réflexion sur le lien entre médias et réseaux sociaux, qui est quelque chose d’extrêmement inquiétant pour l’avenir », a-t-il confié au quotidien belge Le Soir.
L’ancien directeur n’a pas tout perdu en obtenant un poste manifestement taillé à sa mesure, sans toutefois être créé spécialement pour lui. La perspective est celle de la célébration du bicentenaire de la Belgique en 2030 où la culture aura une part déterminante et pour laquelle la Ville de Bruxelles prépare activement, de son côté, sa candidature comme Capitale européenne de la culture.
Le nouveau poste de Michel Draguet est plus stratégique que celui de directeur d’institution. Il consistera à explorer les pistes pour mieux exploiter et valoriser de façon thématique et transversale les collections fédérales (Musées royaux des beaux-arts de Belgique, Musée royal d’art et d’histoire, Musée de l’armée, Bibliothèque royale, AfricaMuseum à Tervuren). Il s’agira de mettre en valeur un patrimoine parfois endormi et de l’inscrire dans une perspective internationale pour l’horizon 2030. Les contacts que Michel Draguet a noués au sein du Groupe Bizot (groupement international d’organisateurs de grandes expositions) avec d’autres directeurs d’institutions muséales constituent un atout à cet égard.
Cette nouvelle fonction rappelle celle obtenue par Paul Dujardin – l’ancien directeur de Bozar dont la gestion conflictuelle de son personnel avait amené à sa mise à l’écart – à qui a été confiée la mission de réévaluer le site du parc et des musées du Cinquantenaire (Musées d’art et histoire, de l’Armée, de l’Autoworld), également dans le cadre du bicentenaire de 2030.
Aux Musées royaux des beaux-arts de Belgique, l’intérim de la direction générale sera assuré, à partir du 1er mai, par Sara Lammens, actuelle directrice de la Bibliothèque royale de Belgique, en attendant la mise en place de la procédure de recrutement d’une nouvelle direction. Ce processus prendra plusieurs mois et ouvre une autre période de transition pour l’institution bruxelloise, dont les projets de rénovation viennent une nouvelle fois d’être reportés.