Beaufort24, la Triennale de Bruges et l’exposition « Rebel Garden », présentée dans trois musées brugeois, se tiennent sur une aire géographique qui s’étend le long du littoral belge en passant par la ville de Bruges, toute proche. Au Moyen Âge, cette dernière était un port maritime, ce qui explique en partie sa richesse patrimoniale et artistique.
Triennale de Beaufort
S’étirant de la frontière française à la frontière néerlandaise, la triennale de Beaufort – organisée par la commissaire d’exposition Els Wuyts – a pour principe d’installer, pendant la belle saison, des œuvres d’artistes contemporains du front de mer, avec ses dunes et ses vastes plages, à l’arrière-pays. Les dix-huit œuvres sélectionnées s’intègrent à des degrés divers au milieu naturel, jouant soit de la monumentalité (celles de Maëlle Dufour, Johan Creten, Femmy Otten, Marius Ritiu ou encore Sara Bjarland) telle la colossale structure en béton, Star of the Sea, qu’Ivan Morison a érigée sur la plage de Zeebruges à la manière d’un site archéologique sorti des flots ; soit de l’insertion fluide à leur environnement (celles de Filip Vervaet, Alexandra Bircken, Romain Weintzem, Richard Deacon ou encore Lucie Lanzini), mais toujours en adéquation avec l’emplacement choisi par l’artiste et en tenant compte de la population, locale ou touristique, qui le fréquente.
Certaines œuvres de la manifestation sont à présent pérennes, constituant, au fil de ces huit éditions, un véritable musée d’art contemporain à ciel ouvert que le public a fini par s’approprier : la pieuvre géante de Laure Prouvost ensablée à La Panne, la tortue dorée monumentale de Jan Fabre à Nieuport, la pelleteuse gothique de Wim Delvoye sur la plage de Westende, les grands rochers rouges d’Arne Quinze dressés sur la digue d’Ostende, le labyrinthe de verdure de Jan Vercruysse à Knokke, sans oublier Anne et Patrick Poirier, Matt Mullican, Daniel Buren, Guillaume Bijl, Jason Dodge ou Jean-François Fourtou, pour ne citer que quelques-uns parmi la quarantaine d’artistes.
Triennale de Bruges
Intitulée « Spaces of Possiblity », la 4e Triennale de Bruges tente de répondre à la question, récurrente, que se posent toutes les villes et tous les sites classés au patrimoine mondial de l’Unesco : comment faire coexister l’architecture et l’art contemporain? Comment penser ou associer, dans un lieu où la conservation et le patrimoine revêtent une importance structurelle, les notions de durabilité et de changement ? Une douzaine d’artistes et de cabinets d’architecture internationaux sont invités à redéfinir ce qu’est la ville et de quelle manière l’envisager différemment en tenant compte de sa topographie et de son histoire. Bruges fut en effet un centre de commerce européen médiéval incontournable, où l’empreinte des ordres religieux est des plus marquées, et fait aujourd’hui partie des destinations touristiques prisées, puisqu’elle accueille près de cinq millions de visiteurs par an, avec les contraintes, pour ne pas dire les nuisances, que cela entraîne pour ses infrastructures comme pour ses habitants.
Cette édition se concentre sur les quartiers décentrés et les lieux négligés ou mal utilisés au regard de leur potentiel. Ainsi la cour des Halles jouxtant le beffroi est transformée en agora ou en scène temporaire par le cabinet d’architecture bruxellois Traumnovelle, qui se présente comme un collectif militant engagé dans les débats sur l’environnement. Le clocher contemporain de The Tower of Balance du Bangkok Project Studio dialogue avec ses homologues religieux ou civils du centre-ville. De même, la construction en briques des architectes japonais Shingo Masuda et Katsuhisa Otsubo située dans le parc de l’hôpital Saint-Jean renvoie au bâti brugeois. D’autres créations se distinguent par leur côté plus poétique, comme les bottes en bronze d’Iván Argote qui semblent flotter comme par magie à la surface d’un canal, ou les tapis végétaux de l’artiste et ingénieur-architecte belge Adrien Tirtiaux composés des fragments d’une ancienne rue recouverts de mousse et de végétation, qu'il a exhumés tel un archéologue.
Ces préoccupations environnementales et sociétales se retrouvent dans l’exposition « Rebel Garden » qui se déploie en une dizaine de sections réparties dans trois institutions patrimoniales : le musée Groeninge, le musée Gruuthuse et le musée Hôpital Saint-Jean. Elle mêle œuvres et interventions contemporaines aux peintures des maîtres flamands ou des collections historiques de la ville. L’objectif est de dépeindre les liens complexes et parfois tumultueux unissant ou écartant l’homme de la nature, dans une cité où elle occupe une place importante à travers les canaux et les jardins. Devant l’ancien couvent qu’était l’hôpital Saint-Jean, Les Veines du cloître, l’installation pérenne de Giuseppe Penone, prend majestueusement possession des lieux : une île en marbre émerge de l’eau surplombée de quelques chênes.
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Beaufort24, 27 mars - 3 novembre 2024, de La Panne à Knokke.
Triennale Brugge, « Spaces of Possibility », 13 avril - 1er septembre 2024, divers lieux dans Bruges.
« Rebel Garden », 13 avril - 1er septembre 2024, musée Groeningen, musée Gruuthus et musée Hôpital Saint-Jean, Bruges.