Nico Williams est cette année le récipiendaire du prix d’art contemporain le plus prestigieux du Canada, le prix Sobey pour les arts (Sobey Art Award). Le lauréat du prix, doté de 100 000 dollars canadiens (67 480 euros) a été annoncé lors d’une cérémonie qui s’est déroulée samedi soir, 9 novembre 2024, au Musée des beaux-arts du Canada (MBAC), à Ottawa, où une exposition présentant les six artistes présélectionnés est visible jusqu’au 6 avril 2025. Les autres artistes présélectionnés – Taqralik Partridge, Judy Chartrand, Rhayne Vermette, June Clark et Mathieu Léger – recevront chacun 25 000 dollars canadiens (16 868 euros).
« Je ne me sens pas du tout à l’aise de recevoir ce prix », a déclaré Nico Williams à The Art Newspaper. L’artiste anishinaabe de 35 ans, établi à Montréal, est connu pour sa pratique pluridisciplinaire et souvent collaborative, centrée sur le perlage sculptural et les installations d’objets trouvés contemporains, des cartes de bingo aux chaises de jardin.
« Être récompensé par ce prix valide ma pratique du travail avec les perles, a-t-il déclaré. C’est un support que mes ancêtres travaillent depuis longtemps. Le fait d’être reconnu pour avoir travaillé avec un tel matériau donne un nouveau souffle à cette pratique. Et le fait que les conservateurs, les pairs et le jury acceptent cette pratique est merveilleux. »
Au cours de la cérémonie, à laquelle assistaient des artistes représentant des régions d’un océan à l’autre – y compris d’anciens lauréats et des candidats comme Kablusiak, lauréat.e en 2023, qui a remis le prix à Nico Williams –, le directeur des initiatives curatoriales du MBAC, Jonathan Shaughnessy, qui présidait le jury du prix Sobey pour les arts 2024, a fait l’éloge du travail de l’artiste.
« Le jury s’est senti obligé de reconnaître l’énergie et la pertinence indéniables de l’approche de Nico Williams en matière de sculpture perlée contemporaine, qui nous permet d’imaginer de nouvelles possibilités pour le médium, a déclaré Jonathan Shaughnessy. Ses œuvres d’une précision irréprochable transcendent des objets du quotidien pour les élever à un niveau spectaculaire et intègrent des expériences personnelles dans des récits touchant le plus grand nombre. Travaillant avec et par-delà la communauté, la pratique de Williams remet en question la persistance des héritages coloniaux en faisant remonter à la surface la mémoire collective et les nostalgies partagées. »
Pour la première fois, les autres membres du jury étaient six artistes canadiens – tous d’anciens finalistes ou lauréats du prix Sobey pour les arts, représentant chacune des régions – ainsi que d’un juré international. Le jury, d’Ouest en Est, était composé de asinnajaq (de la région circumpolaire), Jeremy Shaw (Pacifique), Divya Mehra (Prairies), Stephanie Comilang (Ontario), Caroline Monnet (Québec), Mario Doucette (Atlantique) et Zoé Whitley, la directrice de la Chisenhale Gallery, à Londres. Le montant du prix s’élève désormais à 465 000 dollars canadiens (313 733 euros). Financé par la Sobey Art Foundation, il s’agit du prix d’art contemporain le plus richement doté du Canada et l’un des plus généreux au monde.
Cette année, quatre des six finalistes étaient des artistes autochtones et leurs œuvres reflètent les questions de lieu, d’identité, de communauté et d’appartenance. « J’ai l’impression de remporter ce prix à la fois collectivement et ancestralement, a confié Nico Williams à The Art Newspaper. Dans mon atelier, sept à onze personnes travaillent sur un projet à un moment donné. Six d’entre elles étaient présentes ce soir [samedi 9 novembre] et je leur ai demandé de se lever et d’être applaudies. »
Nico Williams, dont le sac Ikea perlé intitulé Feast (2024) a été présenté dans l’exposition « Focus » à la Foire Art Toronto cette année, exposera prochainement à la Fondation PHI pour l’art contemporain à Montréal. L’artiste affirme que la dotation du prix « sera d’un grand soutien pour [son] atelier. »
« Il y a dix ans, l’un de mes modèles les plus influents, Nadia Myre, a reçu ce prix, a-t-il ajouté. Je veux faire passer le même message à tous les jeunes de la brousse : nous y arriverons ! Je suis extrêmement reconnaissant à toutes les personnes qui ont soutenu ma pratique depuis le tout début ! Sans vous, je ne serais pas là où je suis aujourd’hui ! Chi-miigwech ! [mot anishinaabe signifiant « merci »] ».