Avec 384 millions d’euros d’enchères, Christie’s enregistre un bond notable de 23 %. Ceci alors que les résultats mondiaux du groupe sont en recul de 16 % pour les ventes publiques et de 6 % en incluant les ventes privées. Si la part de la France reste minime dans ces résultats (mais il faudrait aussi prendre en compte les exportations), sa performance impressionne dans un contexte mondial compliqué. En premier lieu, Christie’s a pu compter sur l’envolée du Melon entamé de Chardin, vendu 26,7 millions d’euros. Mais aussi sur l’extraordinaire collection Barbier-Mueller d’art africain et océanien, qui a totalisé 73 millions d’euros, un record ! Plus récemment, elle a entre autres dispersé les collections de la Régie Renault (10,6 millions d’euros), celle de la galerie Jean Fournier (9,1 millions d’euros) ou encore une console-sculpture Promenade des amis en bronze patiné de Diego Giacometti, qui s’est envolée à 9,5 millions d’euros, un record mondial pour ce sculpteur très prisé. Toutefois, face à un contexte incertain, « nous avons globalement baissé nos estimations de 10 à 15 % pour susciter l’intérêt des enchérisseurs et obtenir les meilleurs prix », explique Cécile Verdier, présidente de Christie’s France.
Chez Sotheby’s, ce sont 362,5 millions d’euros (en incluant la vente des Hospices de Beaune, une dispersion caritative) qui ont été engrangés, soit une baisse de 14,5 %. « Bien que le premier semestre 2024 ait présenté des défis pour le marché de l’art mondial, nous sommes fiers de la capacité de Sotheby’s Paris à naviguer à travers cette période complexe avec résilience et innovation. Depuis son inauguration en octobre, notre siège phare parisien est devenu une destination à part entière, témoignant de notre engagement et de notre ambition pour la France », a déclaré Mario Tavella, président de Sotheby’s France. La maison a entre autres cédé pour 6,8 millions d’euros et 6 millions d’euros deux tableaux de Jean Dubuffet, et l’art surréaliste désormais dispersé à Paris et plus à Londres a brillé avec des œuvres de Dalí et Magritte, qui ont dépassé les 3 millions d’euros. La collection Volpi d’arts décoratifs et tableaux italiens, importée de la péninsule, a récolté la bagatelle de 7,5 millions d’euros.
Chez Artcurial, l’année se termine à hauteur de 186,6 millions d’euros, dont 15 millions d’euros générés, selon la maison du Rond-Point des Champs-Élysées, par la société d’enchères suisse Artcurial Beurret Bailly Widmer, récemment acquise. Ce total est en léger recul de 14 %. La maison française a enregistré 13 enchères millionnaires, et vendu notamment une Ferrari pour 5,3 millions d’euros, une sculpture de Niki de Saint Phalle pour la coquette somme de 642 000 euros ou un tableau de Dalí pour 3,1 millions d’euros. Cette année du centenaire du surréalisme aura été visiblement bénéfique à tous ! L’art contemporain a tout de même fait moins d’étincelles, Artcurial ayant concentré le « best of » de ses ventes au second semestre, en octobre pendant Art Basel Paris, sans organiser une autre dispersion en décembre. Fin décembre, les documents et archives du général De Gaulle ont flambé pour totaliser 5,9 millions d'euros.
Dans l’ensemble, « la maturité de la maison et la multiplicité de ses spécialités lui permettent de tenir dans un contexte différent d’il y a un ou deux an(s). Nous souffrons peut-être moins que ceux qui sont axés sur le très contemporain », confie Stéphane Aubert, directeur associé chez Artcurial. Et d’ajouter : « le marché de l’art est cyclique. Il ne peut être en hausse en permanence. »
C’est probablement grâce à cette diversité et aussi, paradoxalement, au fait qu’elles ne sont pas tirées par les œuvres ou les collections les plus chères du marché que les maisons françaises semblent résister sans accuser de décrochage majeur. S’il reste difficile de départager des sociétés françaises qui communiquent en incluant leurs ventes réalisées à l’étranger, Millon engrange 120 millions d’euros, en forte hausse, mais entre autres grâce à l’acquisition de Il Ponte Casa D’Aste, 3e maison de ventes en Italie ; Bonhams Cornette 97,7 millions d’euros (plus 31,2 millions en Belgique), en léger recul ; Piasa 65 millions, en hausse de 8 % ; Aguttes 58,7 millions d’euros contre 47,5 millions en 2023 ; Osenat 50,3 millions, soit +25,44 %, ; et Ader 47 millions d’euros contre 59 millions d’euros l’an passé. De son côté, Drouot déclare 335,9 millions d’euros de ventes à l’Hôtel Drouot, complétées par un volume de 269 millions d’euros en live sur Drouot.com. Ces deux chiffres agrégés représentent une hausse de 4,3 % par rapport à l’an dernier.