La Fondation Hasselblad a annoncé que Sophie Ristelhueber est la lauréate du prix Hasselblad 2025, la plus importante récompense au monde dans le domaine de la photographie. La Française recevra une médaille d’or, un appareil photo Hasselblad et la somme de 2 000 000 couronnes suédoises, l’équivalent de 182 745 euros.
Sophie Ristelhueber bénéficiera d’une exposition personnelle au Centre Hasselblad à Göteborg, en Suède, du 11 octobre 2025 au 18 janvier 2026. Une série d’événements célébrant son travail sera également organisée au cours de la Semaine du prix Hasselblad, comprenant : un séminaire en collaboration avec le conseil d’administration du comté de Västra Götaland et un concert avec l’Orchestre symphonique de Göteborg le 9 octobre ; une réception d’ouverture, le lancement d’un livre et la cérémonie officielle de remise des prix le 10 octobre à Göteborg, ainsi qu’une conférence de l’artiste à la Bonniers Konsthall de Stockholm le 15 octobre.

Sophie Ristelhueber, Eleven Blowups #1, 2006. © Sophie Ristelhueber
« Un ensemble précis, cohérent et unique d’œuvres explorant des paysages et des territoires – tant publics que privés – définit la carrière artistique de l’artiste française Sophie Ristelhueber, qui a débuté il y a quarante-cinq ans, précise la Fondation Hasselblad. À travers ses séries réalisées dans des régions déchirées par la guerre, elle remet en question le domaine de la photographie journalistique en développant son propre langage visuel. Les traces et les cicatrices de la violence – sur la terre, le corps humain et l’architecture – sont au cœur de ses images puissantes au cadrage serré, notamment dans ses fameuses séries sur le Moyen-Orient et les Balkans. Les photographies grand format de Sophie Ristelhueber sont souvent présentées de manière non conventionnelle et peuvent être associées, dans des installations in situ, à des vidéos et des sons. »
« Nous sommes très honorés de célébrer Sophie Ristelhueber en tant que 45e lauréate du prix Hasselblad, a salué Kalle Sanner, directeur général de la Fondation Hasselblad. Ses photographies restent toujours d’actualité, et j’espère que son travail peut nous offrir de nouvelles perspectives sur le monde dans lequel nous vivons. Le fait que la Fondation Hasselblad présente pour la première fois ses œuvres à un public plus large en Scandinavie est incroyablement enthousiasmant. »
« Comme vous le savez, on ne meurt pas de ne pas être aimé, mais de ne pas être cru, disait un vieil ami lorsque nous parlions de la condition de l’artiste, a déclaré Sophie Ristelhueber à l’annonce du prix. Ce qui est en jeu, c’est que nous mettons tout en jeu, en inventant de nouveaux modèles sans savoir s’ils résonneront un jour. C’est pourquoi, pour l’artiste que je suis, ce prix prestigieux revêt une signification si profonde. »

Sophie Ristelhueber, Every One #14, 1994. © Sophie Ristelhueber
Née en 1949 à Paris, où elle vit et travaille, Sophie Ristelhueber a étudié la littérature à la Sorbonne, s’intéressant plus particulièrement au mouvement du « Nouveau roman », qui remettait en question les structures narratives traditionnelles en racontant des histoires fragmentées et en mettant l’accent sur les détails. Ces principes ont influencé sa pratique photographique, attentive aux traces plutôt qu'à la représentation de l’événement réel. Ses publications témoignent également de sa formation littéraire. Les livres d’artiste de Sophie Ristelhueber sont souvent de petit format, où des fragments de texte sont partie intégrante de la narration visuelle. Elle a personnellement conçu et publié un grand nombre de ses livres en éditions limitées, tous devenus des objets de collection recherchés.
Sophie Ristelhueber « poursuit, depuis près de trente ans, une réflexion sur le territoire et son histoire, au travers d’une approche singulière des ruines et des traces laissées par l’Homme dans des lieux dévastés par la guerre ou par des bouleversements naturels et culturels, précise la galerie Poggi qui représente l’artiste à Paris. Loin du photoreportage classique, elle s’attache à la mise à nu des faits et à l’empreinte de l’histoire, dans les corps et dans les paysages, en rendant visibles plaies et cicatrices, véritables mémoires des "faits" de l’histoire. » Le Liban, le Koweït, l’ex-Yougoslavie, l’Irak et la Cisjordanie, autant de lieux marqués par les conflits, sont au cœur de son travail. Évitant le sensationnel, elle saisit avec son objectif les traces silencieuses et durables de l’activité humaine. Ses prises de vues sont des œuvres plastiques à part entière, jouant sur la matière et le format de l’image, son statut, son cadre et son installation dans l’espace.

Vue de l'exposition « Sophie Ristelhueber », série Fait, au Jeu de Paume, Paris, 2009. © Sophie Ristelhueber
Le travail de Sophie Ristelhueber a été présenté dans de nombreuses institutions internationales, parmi lesquelles le MoMA (New York, États-Unis), le Museum of Fine Arts (Boston, États-Unis), le ZKM (Karlsruhe, Allemagne), l’Albright-Knox Art Gallery (Buffalo, États-Unis), The Power Plant (Toronto, Canada), la Tate Modern (Londres, Grande-Bretagne), l’Imperial War Museum (Londres, Grande-Bretagne), les Biennales de Johannesburg (Afrique du Sud), São Paulo (Brésil), la Triennale de Etchigo-Tsumari au Japon, les Rencontres de la photographie d’Arles, et à Paris, notamment, le musée national d’Art moderne (MNAM)/Centre Pompidou, le Jeu de Paume, le musée Zadkine, le musée Rodin, le musée d’Art moderne de Paris.
Les photographies de Sophie Ristelhueber sont conservées dans de prestigieuses collections publiques, dont celles du Museum of Fine Art (Boston, États-Unis), de l’Albright-Knox Art Gallery (Buffalo, États-Unis), de la National Gallery of Canada (Ottawa, Canada), du Victoria & Albert Museum (Londres, Grande-Bretagne), mais aussi, à Paris, du musée national d’Art moderne (MNAM)/Centre Pompidou, du musée d’Art moderne de Paris, de la Maison européenne de la photographie (MEP), de la Bibliothèque nationale de France et du Centre national des arts plastiques (CNAP). Différents Fonds régionaux d’art contemporain (FRAC Bretagne, FRAC Normandie, FRAC Corsica, FRAC Sud – Cité de l’art contemporain) ont également acquis ses œuvres.
Créée en 1979, conformément aux dernières volontés et au testament d’Erna et Victor Hasselblad, la Fondation Hasselblad a pour but de promouvoir l’enseignement et la recherche scientifiques dans le domaine de la photographie et des sciences naturelles. Le prix international annuel Hasselblad est décerné depuis 1980. Sophie Ristelhueber succède à Ingrid Pollard (2024) et Carrie Mae Weems (2023), ainsi qu'à d'autres photographes aussi illustres que Daidō Moriyama (2019), Wolfgang Tillmans (2015), Paul Graham (2012), Sophie Calle (2010), Nan Goldin (2007), Bernd et Hilla Becher (2004), Malick Sidibé (2003), Jeff Wall (2002), Cindy Sherman (1999), William Eggleston (1998), Robert Frank (1996), Richard Avedon (1991), Irving Penn (1985), Henri Cartier-Bresson (1982) ou encore Ansel Adams (1981).
Le jury du prix Hasselblad 2025 était composé de : John Fleetwood, président du jury, directeur de Photo : (Afrique du Sud), codirecteur du département photographie, Académie royale des Arts de La Haye (KABK) (Pays-Bas) ; Shoair Mavlian, directeur de Photographers’ Gallery (Royaume-Uni) ; Anna Planas, directrice artistique de Paris Photo (France) ; Raquel Villar-Pérez, chercheuse indépendante, auteure et commissaire, doctorante au Edinburgh College of Art, Université d’Édimbourg (Écosse, Royaume-Uni) ; Francesco Zanot, commissaire indépendant (Italie) ; et Karolina Ziębińska-Lewandowska, directrice du Musée national de Varsovie (Pologne).