Au début de l’année 1457, Francesco Pesellino est un artiste accompli, âgé d’une trentaine d’années, qui mène une brillante carrière. Réputé pour les détails minutieux de ses panneaux, il compte la famille Médicis parmi ses mécènes et Filippo Lippi parmi ses collaborateurs. Mais la peste l’emporte l’été de cette même année. Son nom et son œuvre sont ensuite tombés dans un tel oubli qu’aucune exposition n’avait jamais été consacrée à l’artiste jusqu’à aujourd’hui. Réunissant des pièces issues de la collection de la National Gallery de Londres enrichies par des prêts, « Pesellino : A Renaissance Master Revealed » [« Pesellino : Un maître de la Renaissance révélé »] vise à mettre en lumière le corpus de ce Florentin talentueux et à faire connaître son œuvre à un public de non spécialistes.
L’exposition s’articule autour de deux panneaux, L’histoire de David et Goliath et Le triomphe de David (tous deux peints vers 1445-1455), qui retracent l’histoire de ce roi de l’Ancien Testament. Ils faisaient probablement partie d’un opulent cassone, ou coffre de mariage. Ils montrent l’habileté de Pesellino : David et Goliath s’inscrivent dans un extravagant cortège de la Renaissance, riche en animaux et en dorure. David est représenté en plein élan alors qu’il lance une pierre sur le géant, tandis que les chevaliers s’élancent dans toutes les directions sur leurs chevaux harnachés avec faste, ce qui donne à Pesellino l’occasion de prouver sa maîtrise de la technique novatrice à l’époque de la perspective.
Ces panneaux sont entrés à la National Gallery, initialement sous forme de prêt, il y a près de cinquante ans. Leur restauration récente a révélé l’extraordinaire complexité des feuilles d’or et d’argent de Pesellino, ainsi que des rayures sur la peinture et la présence de trous de serrure, qui ont été comblés par la suite. Ces panneaux faisaient partie d’un objet conçu pour être utilisé et, malgré toute leur splendeur, ils n’ont manifestement pas subjugué leurs propriétaires, qui devaient être très riches. L’un des thèmes principaux de l’exposition est le lien entre Pesellino et les Médicis. Outre leur qualité exceptionnelle, l’inclusion de plusieurs armoiries des Médicis dans les panneaux de l’histoire de David suggère qu’ils auraient pu faire partie de l’ameublement du palais des Médicis à Florence.
Pesellino a acquis une réputation de peintre de petits tableaux, mais s’il avait vécu plus longtemps, il aurait certainement bénéficié de nombreuses commandes pour des œuvres plus importantes. L’exposition comprend également Le Retable de Santa Trinità de Pistoia (1455-1460), une œuvre de grande dimension qui tourne le dos à la tradition médiévale des retables polyptyques, dans lesquels les figures peintes étaient séparées les unes des autres par un cadre architectural. En effet, Pesellino représente des saints, des anges et les trois personnages de La Trinité au sein d’un même paysage de la campagne vallonnée de Toscane. Laissé inachevé à sa mort, le retable a été complété par Filippo Lippi et constitue le plus ancien retable à un seul panneau de la National Gallery.
Le Retable de Santa Trinità de Pistoia est par chance parvenu jusqu’à nous, après avoir été divisé en plusieurs pièces au cours du XVIIIe siècle et dispersé dans toute l’Europe. Les sections ont été progressivement acquises et rassemblées par la National Gallery au cours des trois premières décennies du XXe siècle.
Sous le commissariat de Laura Llewellyn, l’exposition « Pesellino : A Renaissance Master Revealed » vise aussi à montrer l’intérêt porté par la National Gallery à cet artiste. La salle 46 qui accueille cet accrochage, un espace contraint, constitue le lieu idéal pour une telle présentation et admirer de près l’œuvre fascinante de Pesellino. L’exposition est accompagnée du premier catalogue entièrement illustré sur l’artiste publié en anglais.
« Pesellino : A Renaissance Master Revealed », 7 décembre-10 mars 2024, National Gallery, Londres, Grande-Bretagne.