Le marché était prudemment optimiste pour 2024, selon The Art Basel and UBS Global Art Market Report. Mais le marché n’a pas toujours raison. Ce dernier a chuté de 12 % en 2024, surtout en raison de collectionneurs devenus frileux, puisque incertains quant à l’avenir proche, et privilégiant la pierre ou l’or aux œuvres. Les enchères, elles, ont plongé de 25 %. C’est surtout le haut du marché – les transactions en millions et dizaines de millions de dollars – qui voit son volume se contracter, tandis que les adjudications inférieures à 5 000 dollars se portent (plutôt) bien, du moins mieux. Ceci, sans oublier la confusion régnant sur le commerce international de l’art à cause du nouveau régime douanier annoncé par le président américain Donald Trump. Pourtant, certains résultats récents contredisent un pessimisme généralisé, en particulier à Paris où plusieurs coups de marteau ont eu lieu ce printemps avec succès. Chez Christie’s, on retient la collection d’Henri Canonne (5,3 millions d’euros) ou encore et surtout la peinture Jane Avril au Divan japonais d’Henri de Toulouse-Lautrec (acquise pour 5,4 millions d’euros). Chez Sotheby’s, c’est celle de Niomar Moniz Sodré Bittencourt qui a remporté les suffrages (11,4 millions d’euros), notamment avec la sculpture en bronze Femme debout d’Alberto Giacometti (vendue 4,9 millions d’euros).
DE BELLES VACATIONS
Qu’en est-il de l’autre côté de l’Atlantique ? Réponse ce mois à New York où plusieurs belles enchères sont attendues. Lors de la vente du soir du XXe siècle du 12 mai 2025, Christie’s parie sur Big Electric Chair (1967-1968), une acrylique de 1,80 mètre par Andy Warhol et estimée à 30 millions de dollars (26 millions d’euros). Issue d’une série de quatorze toiles, cette sérigraphie rose provient de la collection des mécènes belges Roger Matthys et Hilda Colle. La vente est aussi dominée par Peupliers au bord de l’Epte, crépuscule, une huile de la série très convoitée des Peupliers de Claude Monet, exécutée en 1891. Attendue entre 30 et 50 millions de dollars (26,3 à 43,8 millions d’euros), elle a appartenu pendant plus de cinquante ans au marchand Paul Durand-Ruel et sa famille puis à une collection privée où elle a été conservée durant plus de soixante ans.

Claude Monet, Peupliers au bord de l’Epte, crépuscule, 1891, huile sur toile (est. 26,3-43,8 millions d’euros). © Christie’s
Le 14 mai se tient la vente du soir du XXIe siècle avec Baby Boom, un triple portrait de 1982 par Jean-Michel Basquiat le représentant aux côtés de ses parents. Estimé de 20 à 30 millions de dollars (17,5 à 26,3 millions d’euros), ce tableau comptait parmi les œuvres exposées à la Fun Gallery, à New York, en novembre 1982, ainsi qu’à la rétrospective de la Fondation Louis-Vuitton, à Paris, en 2019.
Moins impressionnante sur le papier, la série de ventes de Sotheby’s comprend tout de même, le 15 mai, la collection de la galeriste Daniella Luxembourg. L’ensemble de 15 œuvres inclut des pièces de Michelangelo Pistoletto, Alexander Calder, Claes Oldenburg ou encore Lucio Fontana, avec Concetto spaziale, La Fine di Dio, estimé de 12 à 18 millions de dollars (10,5 à 15,8 millions d’euros). Dans la vente d’art moderne du 13 mai sont proposées trois œuvres issues d’une collection française et restées à l’abri des regards pendant plus de quarante ans : FOO, un pastel sur papier de 1982 par Jean-Michel Basquiat (estimé de 600 000 à 800 000 dollars) ; Flowers, une sérigraphie en couleurs de1964 par Andy Warhol (estimé de 1 à 1,5million de dollars) ; et Smoker#25, une toile de 1977 par Tom Wesselmann (estimée de 1,5 à 2 million[s] de dollars). Par ailleurs est mise en vente Saint-Georges. Couchant (Venise), une toile vibrante de couleurs peinte en 1905 par Paul Signac. Estimée entre 7 et 10 millions de dollars (6 à 10 millions d’euros, soit la plus haute estimation à ce jour pour l’artiste), l’œuvre est restée dans la même collection privée française durant soixante-dix ans. Dans la même vacation se trouve aussi Portrait de madame Cezanne, réalisé par Paul Cezanne vers 1877 et faisant partie de la succession des collectionneurs suisses Rolf et Margit Weinberg (évalué à 6 millions d’euros), ainsi que Peinture 92×73cm, 30juin 1959, un tableau issu de la série des chefs-d’œuvre rouges de Pierre Soulages mis sur le marché pour la première fois depuis soixante-dix ans (estimé entre 3 et 5 millions de dollars).
Enfin, chez Phillips, les estimations restent prudentes le 13 mai pour la vente d’art moderne et contemporain du soir, avec des prix compris entre 4 et 6 millions de dollars pour les œuvres phares. Ainsi en est-il d’Homme et femme à table, un pastel et crayon noir croqué par Pablo Picasso en 1902-1903 ou Mann mit zwei Kindern, une huile sur toile de 1966 par Gerhard Richter.
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« 20th/21st Century Auctions », 12 et 14 mai 2025, Christie’s, 20, Rockefeller Center, New York, États-Unis.
« The New York Sales », 13 et 15 mai 2025, Sotheby’s, 1334, York Avenue, New York.
« Modern & Contemporary Art Evening Sale », 13 mai 2025, Phillips, 432, Park Avenue, New York.