C’est un lieu extraordinaire accroché à une colline du sud de la Toscane, un lieu qui concentre tout l’imaginaire et la créativité d’une artiste que l’on ne cesse de redécouvrir : le Jardin des Tarots, situé à Capalbio, est assurément le grand œuvre de Niki de Saint Phalle. Sur ce site, elle a inlassablement réalisé à partir de 1978 sculptures, fontaines, habitations, parfois avec la complicité de Jean Tinguely, consacrant à cette œuvre d’art unique toute son énergie et une bonne partie de ses revenus pendant plus de vingt ans. Attirée par l’occulte et le secret, elle s’inspire ici des 22 arcanes majeurs du Tarot pour ses créations. Le visiteur est ainsi accueilli par la Papesse, la carte n°2, « la grande prêtresse du pouvoir féminin de l’intuition », affirmait l’artiste, avant, au gré de la déambulation, de découvrir la Justice, l’Étoile, le Monde ou l’Empereur… Dans l’une des sculptures, Niki de Saint Phalle s’était aménagé un appartement tout en tessons de miroir, avec salon, cuisine, salle de bains et chambre, à en donner le tournis. Avec ce vaste projet, l’artiste s’inscrit dans la lignée de jardins remarquables, comme le parc Güell de Gaudí à Barcelone ou le Sacro Bosco de Bomarzo, dans le Latium, dont les « monstres » ont été construits à la Renaissance à l’initiative du duc Vicino Orsini.
Le Jardin des Tarots est actuellement évoqué au musée du Luxembourg à Paris, dans l’exposition « Tous Léger ! Avec Niki de Saint Phalle, Yves Klein, Martial Raysse, Keith Haring… » (jusqu’au 20 juillet 2025) qui présente aussi des créations de l’artiste. Mais celle-ci est surtout mise en vedette dans « Niki de Saint Phalle, Jean Tinguely, Pontus Hultén » (26 juin 2025- 4 janvier 2026) organisée par le Centre Pompidou au Grand Palais. Pontus Hultén, premier directeur du musée national d’Art moderne au Centre Pompidou, de 1977 à 1981, a été l’un des fervents défenseurs des deux artistes, dès la découverte de leur travail dans la capitale française. Il les invitera au Moderna Museet de Stockholm, dont il a entre-temps été nommé directeur. Pour l’exposition « Hon – en katedral », en 1966, Niki de Saint Phalle réalise une gigantesque femme-déesse que l’on visite en entrant par le vagin. L’exposition du Grand Palais revient sur cet événement, mais elle présente aussi un vaste panorama de ses créations, de l’extraordinaire Tir, séance 26 juin 1961 appartenant au MAMAC, musée d’Art moderne et d’Art contemporain de Nice, accompagné d’un film noir et blanc documentant sa réalisation, jusqu’à un tableau éclaté réalisé par Niki après la disparition de Jean. Ce Ganesh II (1992), avec son fond rose, avait été présenté par la Galerie Mitterrand sur son stand de la Foire Frieze Seoul en septembre 2024. La Galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois a aussi consacré une exposition à cette dernière série en hommage à Tinguely, en 2023. Compagnon de route de Niki de Saint Phalle pendant de très nombreuses années, Jean-Gabriel Mitterrand présente jusqu’au 26 juillet, dans les espaces de la galerie Mitterrand, deux expositions consacrées à l’artiste sous un titre commun : « Mythologie ». À Matignon sont montrées plusieurs Nanas et en particulier la sculpture du couple Adam et Ève présente au Jardin des Tarots sous le nom Le Choix (carte n°VI). À côté de dessins et de sculptures de plus petites dimensions se dresse dans la galerie du Marais L’Arbre-Serpents (1988), qui resplendit avec son parement de miroirs.
Les amateurs de Niki de Saint Phalle peuvent encore retrouver son « Bestiaire magique » tout l’été dans le sud de la France, à Caumont-Centre d’art, à Aix-en-Provence (jusqu’au 5 octobre), « la première [exposition] à faire un focus sur les animaux dans son œuvre », selon Bloum Cardenas, petite-fille de l’artiste et trustee de la Niki Charitable Art Foundation. Pour découvrir encore de nouvelles facettes d’une