Quel regard portez-vous sur la montée en puissance de l’art africain contemporain ?
C’est pour nous la confirmation d’une conviction qui remonte à plusieurs années. Malgré les suspicions de tendance, nous avons toujours appuyé la pérennité d’un marché qui se renforce d’année en année. Aujourd’hui, nous ne sommes plus très loin de basculer dans un marché établi. Il y a encore un certain nombre de jeunes artistes qui démarrent, mais aussi beaucoup d’autres établis, dont les cotes ne sont plus à défendre. Les prix montent, la présence au sein des collections privées ou publiques est croissante, les expositions se multiplient de pays en pays, d’institutions en institutions, de biennale en biennale.
L’importance prise par certains artistes issus des diasporas a-t-elle amené un regard renouvelé sur les plasticiens africains ?
Il y a indéniablement des liens entre les diasporas et le continent mais nous tenons à éviter d’enfermer les artistes dans des cases. Chacun existe à part entière. Cela dit, il est vrai que certains artistes des diasporas ont pu mettre en lumière d’autres, installés en Occident, comme Kehinde Wiley. Mais l’inverse est très vrai aussi : un artiste comme El Anatsui a eu un impact considérable sur la communauté artistique internationale. J’aime utiliser la notion de regards croisés. Aujourd’hui, nous sommes dans un monde qui, malgré les frontières, est en dialogue constant, formant un brassage de sources et d’inspirations qui fait toute la richesse du monde de l’art contemporain en général.
Qu’en est-il du développement du marché de l’art en Afrique ?
Je dirais qu’il est de plus en plus fort et cela participe à son essor global dans le monde. L’intérêt pour les artistes africains n’est pas limité à l’Occident. Localement, de nombreux acteurs travaillent d’arrache-pied pour le développement de ce marché. Bien sûr, il faut appréhender l’Afrique dans sa totalité, un immense continent aux pays très différents qui, comme l’Europe, possède des centres plus tournés vers la création que d’autres : Lagos au Nigeria, Dakar au Sénégal, Le Cap et Johannesburg en Afrique du Sud, Harare au Zimbabwe, Kinshasa en République démocratique du Congo, Marrakech ou Casablanca au Maroc… Toutes ces villes sont de véritables incubateurs où la programmation culturelle, servant d’ailleurs d’outil de soft power, a de plus en plus d’impact.
Quelles sont les spécificités de cette septième édition d’AKAA ?
Le grand changement cette année réside dans nos dates, puisque nous nous accordons à la semaine de l’art contemporain à Paris en octobre. Il est important pour nous d’être présent à ce moment-là, maintenant que nous avons gagné en maturité et en diversité de médiums. Nous avons un véritable équilibre dans la foire entre artistes établis et émergents ainsi qu’une variété d’œuvres montrées, entre peinture, travail du textile, sculpture et design. Cette année marque également un retour en force pour notre programmation culturelle, qui est entièrement axée sur la notion de mouvement dans l’art, que ce soit le mouvement physique ou engagé.
AKAA, du 20 au 23 octobre 2022, Carreau du Temple, 4 rue Eugène Spuller, 75003 Paris.